ALÈS Décidément sans limite, Pascal Pich entame 38 km de nage avant 1 800 km de vélo
L'expression "aller au bout de soi-même" semble galvaudée quand on se confronte à l'épreuve que Pascal Pich entame aujourd'hui, à Alès, pour la troisième fois de l'année. "Vers l'infini et au-delà" conviendrait mieux à ce recruteur de la Légion, qui s'est mis en tête de réaliser, dans l'année, entre dix et douze déca Ironman. Soit 100 fois l'épreuve de triathlon la plus dure. On démêle les coefficients multiplicateurs et on vous explique.
Pour les profanes - ou les débutants - il y a le triathlon. Une épreuve déjà très exigeante qui se dispute, aux Jeux Olympiques, sur 1,5 km de natation, suivis de 40 km de vélo et 10 km de course à pied. Assez pour avoir besoin de récupérer au moins pendant une semaine ? De la "gnognotte" vous répondront les coureurs d'Ironman. Parce qu'un triathlon Ironman (et même "woman" désormais), ce sont 3,8 km de natation, suivis de 180 km de vélo. L'épreuve se conclut sur un marathon à courir, excusez du peu. Les épreuves s'enchaînant, pas le temps d'aller se reposer entre chaque. De quoi envoyer l'immense majorité du commun des mortels en récupération de très longue durée après une course de plusieurs jours.
38 km de natation dans le Gardon d'Alès
Un Ironman, c'est bien pour Pascal Pitch. Mais pourquoi se priver d'en faire dix quand on a une petite semaine à tuer ? Ce lundi après-midi, Pascal Picth commence donc, à Alès Plages dès 16h30, un périple aller-retour de 38 km de natation dans le Gardon. Puis, demain normalement, il entamera sur le parvis du Cratère, et sur home-trainer et tapis de course, les épreuves suivantes qui devraient durer jusqu'au dimanche 17 juillet. Soit 1 800 km de vélo et 423 kilomètres à pied, le tout sans changer de lieu. Ce sera son troisième déca Ironman de l'année, l'objectif étant d'en faire un par mois jusqu'à la Foire de Paris, le 2 mai 2023. Seuls 30 athlètes ont réussi, pour l'instant, à boucler un déca Ironman et seuls cinq l'ont fait quatre fois. C'est bien le cas de Pascal, qui en a déjà réalisé deux depuis le 2 mai (six en tout). S'il va au bout de son défi sur l'année, il créera un record du monde alors qu'un seul athlète a réussi à boucler dix fois un déca Ironman... sur l'ensemble d'une carrière. Il aura alors parcouru 456 km en nageant, 21 600 sur un vélo et 5 063 km en course à pied...
"Ça fait 3-4 ans que je me suis lancé dans ce projet, avance celui qui, à 58 ans, est recruteur pour la Légion étrangère. Et ç'a été compliqué à mettre en place. Il y a eu la pandémie, le budget, et puis trouver des endroits pour la récupération entre chaque épreuve." Quant à la nature de l'épreuve, elle repose sur le principe, simple quand il est énoncé, de toujours regarder plus haut. "Moi, à chaque fois que je fais un défi, il faut toujours que ce soit plus gros que la fois d'avant. Là, je crois quand même qu'on est au paroxysme", rigole Pascal Pich, Parisien d'origine mais installé à Savignargues depuis vingt ans.
Son dernier challenge consistait, en hommage à la Légion, à rejoindre symboliquement Paris à Camerone (du nom d'une résistance acharnée qui opposa 60 légionnaires français aux troupes mexicaines composées de 2 000 hommes, au Mexique, en avril 1863), soit 11 400 km en 23 jours sur un vélo d'appartement amélioré. En mai 2019, à la Foire de Paris déjà, Pascal Pich avait réalisé douze Ironman en douze jours...
"Je ne me prépare plus, je m'entretiens"
"Depuis 20 ans, je m'entraîne ici, à Alès", sourit le sportif. Une façon de dire que la capitale des Cévennes se devait de faire partie du périple des dix ou douze communes qui verront passer l'exploit dans l'année, après Paris et Brem-sur-Mer, en Vendée. Puis, en août, ce sera Perpignan, avant Béthune, Châlons-en Champagne, Marseille ou Lyon. "Pour l'instant, j'ai dix dates. mais je peux ajouter un double ou un triple Ironman en plus des déca, si une commune ou un événement me sollicite, comme pour une fête des sports quelque part."
Une invitation qui lui fera sans doute couper quelque peu sa récupération. Depuis son exploit vendéen, il n'a eu que trois semaines et n'a pu s'entraîner qu'en course à pied. "Je ne me prépare plus, je m'entretiens", corrige l'ultra trailer. D'autant qu'après chaque épreuve, il faut organiser la suivante, de la location du camion et son chargement, au lieu où loger.
Sans assistance médicale - "mais avec un naturopathe qui me suit depuis 20 ans" - Pascal Pich va affronter la chaleur caniculaire de la semaine sur un parvis surchauffé. Mais il élude le risque : "La préconisation de ne pas faire de sport en période de canicule, je pense que ça concerne ceux qui en font rarement." Lui travaille l'endurance depuis des décennies, avec une fréquence cardiaque très basse "et sans doute une physiologie adaptée qui fait que je ne me blesse pas". Pendant ses centaines de kilomètres, il "ne mange pas tant que ça. J'essaie de faire un repas chaud par jour, avec viande, légumes et pâtes ou riz. Le reste, ce sont essentiellement des choses salées et des fruits, environ une fois par heure".
L'année étant encore longue, Pascal Pich continue de chercher des sponsors intéressés par l'aventure. Sur le parvis du Cratère, la mairie d'Alès a prêté un barnum pour assurer un peu d'ombre. Des associations caritatives s'associent à son exploit pour faire parler d'elle. Pour cette étape, l'association IRPP (recherche rétinite pigmentaire) de Bessèges est mise en avant. Une association pour laquelle il inaugurait, le 3 juillet, un sentier de 5 km équipé pour les malvoyants, "Parcours pour la vue Arielle Dumas", à... Bordezac. Un sentier majoritairement épargné par le gros incendie du 7 juillet.
François Desmeures
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