FAIT DU JOUR LFB, ce laboratoire alésien qui achève la production d'un traitement anti-covid
Depuis le printemps 2020, le laboratoire alésien LFB Manufacturing, spécialisé dans la production d'anticorps monoclonaux et de protéines recombinantes par culture cellulaire, s'est engagé dans la lutte contre le covid en assurant la production d'un traitement expérimental élaboré par une start-up nantaise. Baptisé "XAV-19", il pourrait bientôt arriver sur le marché.
Dans la lutte en cours contre la cinquième vague de covid, il y a en premier lieu le vaccin avec cette course effrénée pour la troisième dose et la "chasse" du Gouvernement aux non-vaccinés, mais il y a aussi d’éventuels traitements, autres que l’hydroxychloroquine ou l'ivermectine que d'aucuns aimeraient voir se généraliser. Car depuis le printemps 2020, l’entreprise nantaise de biotechnologie Xenothera a confié au laboratoire alésien LFB Biomanufacturing la production du "XAV-19", son potentiel traitement anti-covid.
Mix d’anticorps protecteurs similaires à la réponse naturelle de l’Homme, qui neutralisent le virus et l’empêchent de se multiplier, le XAV-19 est le fruit de la recherche de la start-up nantaise qui s’appuie sur une technologie unique et brevetée de production d'anticorps, et qui est déjà appliquée en clinique en transplantation, entre autres. Parce qu'elle était en mesure de mettre à disposition "rapidement" ses capacités industrielles et son expertise dans le domaine de la production de protéines thérapeutiques, qui repose en l'occurrence sur une nouvelle molécule fabriquée à partir de sérum de porc, la structure alésienne a obtenu cette excitante et juteuse mission qui consiste à participer pleinement à la lutte contre la pandémie.
Ainsi, puisque cette dernière a eu le mérite "d'accélérer tous les projets", LFB Manufacturing a pu accroître ses capacités industrielles en construisant une troisième unité de production de 150 m². Le chantier, qui avait débuté en janvier dernier, s'est achevé en septembre, tandis que le projet, qui se chiffre à 4,3 millions d'euros, comprenait également l'achat de matériel de pointe. Au titre du plan France relance, l'État s'est montré au rendez-vous en participant financièrement à hauteur de 3 millions d'euros.
C'est donc avec l'intention de vérifier que les deniers publics ont judicieusement été investis que Guillaume Basset, patron du programme "Territoires d'industrie", a visité le laboratoire LFB au terme d'une tournée alésienne en fin de semaine dernière (lire ici). Et, si la presse avait été éconduite ce jour-là par les organisateurs de l'événement à l'heure de pénétrer dans l'usine, le groupe LFB, par l'intermédiaire de son directeur des affaires corporate, Didier Véron, a montré qu'il était tout sauf "opaque" en nous ouvrant ses portes le temps d'une matinée à l'occasion d'une visite des députés Philippe Berta et Annie Chapelier.
Reçue par Didier Véron en personne accompagné de Roland Béliard, directeur du site LFB d'Alès, la petite délégation à laquelle nous nous sommes mêlés a d'abord été invitée à appliquer un protocole sanitaire rigoureux : changement de masque, désinfection hydroalcoolisée des mains et enfilage d'une tenue de combat à usage unique (notre photo). Après quoi, avec la nécessaire précaution pour ne pas perturber la concentration des opérateurs techniques qui ont démontré leur dextérité, la cohorte s'est familiarisée à la culture cellulaire, que Roland Béliard s'est échiné à définir.
"On introduit dans la cellule le gène qui code la molécule d'intérêt, ensuite on cultive cette cellule et on la fait se multiplier dans des bioréacteurs pour produire le médicament", a explicité le dernier nommé. Qui ajoute : "L'objectif est de faire produire à des cellules de mammifères (cochons, chevaux notamment) cette molécule d'intérêt et de la produire en volume suffisamment important pour satisfaire des fabrications de lots expérimentaux dédiés aux études cliniques."
Pour y parvenir, le laboratoire alésien utilise massivement "la technologie à usage unique" dont les fameux bioréacteurs. Ces derniers, actuellement d'une capacité de 1 000 litres, sont jugés insuffisants. Dans l'optique d'accélérer la cadence à l'heure où ses activités explosent avec la crise sanitaire, LFB espère s'équiper de bioréacteurs de 2 000 litres " très prochainement".
Car en opérant il y a quelques années un recentrage vers son savoir-faire initial relatif aux produits dérivés du plasma, le laboratoire alésien s'est offert une place de choix dans la lutte contre la pandémie, sans pour autant délaisser son expertise en lien avec d'autres pathologies, dont les troubles de la coagulation sanguine d’origine génétique. C'est pourquoi à l'heure actuelle, LFB Alès œuvre simultanément à la fabrication de six médicaments, trois d'entre eux liés au covid, le XAV-19 étant le plus avancé.
Une mise sur le marché début 2022 ?
Alors que l'ultime phase clinique de ce dernier a été réalisée à Alès, son créateur Xenothera, au coude-à-coude avec les géants pharmaceutiques, est dans l'expectative. La présidente de la biotech, Odile Duvaux, garde l’espoir d’obtenir un feu vert des autorités françaises d'ici la fin de l'année. "En production, on est prêts. 20 000 doses sont déjà disponibles tandis que 30 000 ont été précommandées par la France au printemps 2021", confiait-elle il y a quelques jours à nos confrères du Télégramme.
Actuellement analysé par l’Agence nationale de sécurité du médicament et la Haute autorité de santé, le dossier devrait aboutir au plus tard au début de l'année 2022. S'il venait à être autorisé, le XAV-19 serait administré aux patients hospitalisés pour covid, afin de limiter chez ces derniers une aggravation de leurs symptômes et d'éviter un éventuel passage au stade d’insuffisance respiratoire aigüe qui nécessiterait une intégration en réanimation.
Quoi qu'il advienne, la pandémie restera synonyme de réussite aux yeux du directeur des affaires corporate de LFB puisqu'elle a été "l'occasion de démontrer la réactivité et la flexibilité du site alésien". Et Didier Véron de conclure : "C'est un engagement fort de notre part au service des Français dans la mesure où on essaie de contribuer à notre échelle à mettre fin à cette pandémie."
Corentin Migoule