L'INTERVIEW Le sénateur PCF Fabien Gay : "Je ne veux pas rester les bras ballants"

Fabien Gay
- Sacha VirgaLe sénateur PCF et directeur du journal L'Humanité Fabien Gay est allé à la rencontre de l'intersyndicale de la Verrerie du Languedoc. Accompagné par Vincent Bouget, Christian Bastid, Jean-Luc Gibelin, Jean-Michel Suau et d'autres militants communistes, l'élu de Seine-Saint-Denis compte porter le dossier au Sénat.
Objectif Gard : Quelle est pour vous l'importance de venir sur ce site aujourd'hui, en tant que sénateur ?
Fabien Gay : Je me déplace partout où il y a des questions sociales et industrielles. On s'aperçoit au niveau de la France que nous sommes à 300 plans sociaux qui portent mal leur nom. Ce sont des plans de licenciement, de la casse industrielle et de la casse sociale, et 300 000 emplois menacés ou supprimés. La verrerie du Languedoc a surtout trois lignes de production pour Perrier. C'est une stratégie uniquement financière puisqu'on est ici sur un site rentable avec une direction d'entreprise qui a touché des fonds publics pendant des années et qui décide de restructurer non pas parce que le site va mal, mais parce que l'appétit des actionnaires n'est toujours pas rassasié. Ça va avoir une conséquence d'abord sur l'emploi, mais aussi sur un site industriel et des conséquences aussi.
Quelle serait la solution pour vous ?
Il faut que d'abord l'entreprise prenne ses responsabilités, que le donneur d'ordre unique Perrier les prenne aussi et que l'État aussi joue son rôle. Il y a de l'argent public qui a été donné, donc on doit avoir un droit de regard. Ils ont finalisé ce lundi le PSE (Plan de sauvegarde de l'emploi). Ils ont quatre mois maintenant pour retrouver un repreneur dont, en réalité, on ne voit pas qui d'autre que Perrier. Dès aujourd'hui, j'interpellerai le gouvernement d'abord pour savoir ce qu'il va faire à l'initiative du préfet, notamment des tables rondes. J'interpellerai aussi la direction de Nestlé pour savoir si elle compte oui ou non reprendre le site qui est indispensable pour eux, mais indispensable aussi d'abord pour l'emploi et garder les savoir-faire.
Vous avez été reçu par l'intersyndicale de la Verrerie du Languedoc, quels ont été les sujets abordés ?
Je suis venu leur témoigner ma solidarité aux salariés parce que je sais ce que c'est très dur de vivre une fermeture de site. Je les ai trouvés combatifs, ils ont des propositions, ils ne se laissent pas faire, ils sont dans l'action, ce qui est logique et ils vont prendre des initiatives tous les quinze jours, notamment le 1ᵉʳ mai. Ils sont combatifs et ils savent qu'il y a un avenir pour leur site. Ils ont un excellent savoir-faire, c'est la bouteille verte de Perrier, donc il faut savoir le garder. J'étais accompagné de beaucoup d'élus communistes du département, de la région, et de militants et militantes.
Justement, Perrier est également sous la menace, quel est votre avis sur le sujet ?
Il y a une commission d'enquête en ce moment au Sénat, mais je n'y suis pas parce que j'en fais une autre sur l'utilisation des aides publiques, qui planche beaucoup sur les questions, notamment autour de Nestlé. À priori, la source qui est en dessous de Perrier est saine, ce sont les extensions qui posent problème. L'ARS et le préfet vont devoir prendre leurs responsabilités sur cette question sanitaire. Je n'ai pas plus d'éléments que ça à l'heure où je vous parle, mais de toute façon, ça ne peut pas être le préalable à la casse sociale. Les salariés ne sont pas responsables, ce sont les directions et notamment Nestlé depuis plusieurs années. Il y a une question de santé publique.
Sur les aides publiques, qu'avez-vous à rajouter ?
Il y a 2 200 dispositifs en France, ça représente entre 170 et 250 milliards chaque année, c'est le premier budget de l'État. Une entreprise comme celle-ci, je ne sais pas exactement ce qu'elle touche, mais elle doit avoir des exonérations de cotisation sociales. Il y a en tout cas plusieurs millions d'euros sur plusieurs années qui ont certainement été touchés par ce site, donc il faut le conditionner à un moment donné. Il y a une question autour du four qui est en fin de vie en 2027. Il peut y avoir des subventions directes aussi pour accompagner sa transformation, mais ça doit se faire aussi avec des investissements. On ne peut pas avoir des sites comme cela où chaque année on donne de l'argent public sans demander des comptes. Il n'y a aucun critère, ni conditionnement, ni aucune évaluation de toutes ces politiques publiques, ce qui est un véritable scandale.
Au vu du contexte politique, est-ce que ce n'est pas plus compliqué en tant qu'élu de porter des projets ?
Je ne veux pas rester les bras ballants ou être inactif. Il y a besoin de continuer à rencontrer les salariés, à les défendre, à les protéger et à interpeller le gouvernement pour qu'il prenne ses responsabilités. Ce n'est pas parce que la période est pleine d'incertitudes, notamment pour ce gouvernement, que nous devons arrêter d'être aux côtés des travailleurs et travailleuses qui luttent ou de ne pas pouvoir prétendre à changer le système. Ce n'est pas la vision du Parti communiste. Demain, je serai au Sénat pour porter leur voix et on continuera avec les élus locaux ici évidemment à exiger des solutions.