Publié il y a 3 h - Mise à jour le 29.04.2025 - Sabrina Ranvier - 7 min  - vu 343 fois

FAIT DU JOUR L’incroyable essor des fast-food

Dans le Gard, on trouve toutes sortes de burgers. Au Big Rex, ouvert en octobre 2024, certains de ces sandwichs sont fabriqués avec des "buns", des pains rouges.

- Sabrina Ranvier

C’est l’histoire de deux villages gardois. L’un, Saint-Geniès-de-Malgoirès, est enveloppé de champs de vignes. L’autre, Langlade, est dominé par un moulin à vent. Ces deux communes de moins de 3 200 âmes ont tapé dans l’œil de McDonald’s qui y a ouvert des fast-food. Les maires mettent en avant les emplois créés dans un département où se succèdent les plans sociaux. Ces McDo ne devraient pas tarder à avoir de la concurrence. Jack Dentel, premier adjoint à la Calmette, confie que, cette année, des permis de construire devraient être déposés pour construire, dans son village, un KFC et un Burger King. 

Les fast-food à la conquête des campagnes

« Pas de McDo à St-Dio ». En 2011, les habitants de Saint-Dionizy manifestent avec succès contre un projet de fast-food. Quatorze ans plus tard, la firme américaine s’implante peu à peu dans les villages.

Des champs de colza jaune vif, des enfilades de champs de vignes… La petite route qui relie les hauts de Nîmes au village de Saint-Geniès-de-Malgoires est bucolique. Au bout de quelques kilomètres, derrière le bloc gris d’un supermarché, il apparaît, ce « M » jaune mordoré que les ados reconnaissent en un quart de seconde. On a l’habitude de le croiser dans les métropoles, ou sur des axes stratégiques. Mais, la chaîne de fast-food a choisi de s’implanter fin mars dans ce village de la Gardonenque. Est-ce que cela peut fonctionner un McDo dans une commune de 3 120 habitants, située en pleine campagne ?

le nouveau McDo de Saint-Geniès a ouvert le 25 mars. 

McDo nouvelle génération à Saint-Geniès

Le lundi 7 avril dernier, à midi, une trentaine de personnes sont attablées ou tapotent leurs choix de menus sur les écrans. Il y a des parents seuls avec un enfant, des bandes de copines. Vers 12h35, un troupeau de sacs à dos Eastpack déferle. Le fast-food est à 500 mètres seulement du collège. Valérie, 55 ans, aide-soignante dans une clinique, a justement donné rendez-vous à sa petite fille ici, en terrasse. Elle ne se sentait pas bien et le collège l’a appelée pour qu’elle la récupère. Le McDo a ouvert le 25 mars. C’est la troisième fois en quinze jours que Valérie, habitante de la Calmette, vient y manger. Ses deux filles de 23 et 21 ans l’accompagnent. « C’est à côté de la maison. Cela nous évite les descentes sur Nîmes ou Uzès où on allait une fois par mois », argumente Valérie, dont les yeux sont mangés par des lunettes de soleil. Elle a repéré que les employés portent des surchaussures en plastique pour protéger leurs semelles : « Ils n’en ont pas à Nîmes. Ici c’est très propre. » La décoration pastel séduit sa fille Carla 23 ans : « Cela fait un peu resto. »

Sur la table voisine, difficile de rater Didier, 60 ans et Teddy 36 ans. Leurs tenues jaune fluo du service des routes phosphorent. Un thermos est posé sur la table. C’est la première fois qu’ils viennent ici. D’habitude, quand ils sont sur le terrain, ils prennent leur gamelle ou avalent un sandwich acheté en boulangerie. « Là, vous pouvez vous poser, voir des gens. Le sandwich, en général, on le mange dans le camion », argumente Teddy. Sur le plateau de Didier, traînent des épluchures de fruits. « Je les avais dans mon sac. On complète le repas », sourit-il. Lui « évite au maximum » le McDo. Cet habitant de Fons, un village voisin, avoue être venu par curiosité : « Ça fait un peu bizarre de trouver un McDo ici. D'habitude, ils sont en ville ou proche des axes de circulation. C’est étonnant qu’il ne se soit pas installé à la Calmette, à côté de la RN 106. »

Sabrina Ranvier

Pourquoi McDo a choisi Saint-Geniès ? Combien de personnes ont été embauchées ? Sur place, on promet « on vous rappellera ». Au niveau national, le service de presse de la marque n’est guère plus loquace. Jean-François Durand-Coutelle, le maire de la commune, répond par un communiqué de presse. Il s’y félicite d’une « avancée majeure en matière de dynamisation économique et commerciale ». Il loue un projet « porteur de nombreuses opportunités » qui « permettra la création d’emplois locaux » et qui « témoigne de l’attractivité croissante » de la commune. Il souligne enfin « l’évolution engagée par McDonald’s en faveur d’une offre alimentaire diversifiée ».

KFC et Burger King en projet à La Calmette

« Force est de constater qu’il y a un gros engouement de la population pour les fast-food, analyse de son côté Jack Dentel, premier adjoint à la Calmette. Je ne vois pas dans quelle mesure on pourrait dire que c’est bien ou pas bien. » Il explique que sa commune « a été démarchée par Mc Do » : « Visiblement, ils ont préféré s’installer à Saint-Geniès. On n’a pas du tout refusé mais, à l'époque, on n’avait pas d’emplacement disponible. » Un promoteur a proposé au village d’implanter, sur un terrain privé, un magasin de bricolage et un Burger King. « Il y avait des problèmes d’accès sur ce terrain. Alors Burger King est allé du côté de système U, relate le premier adjoint. Le promoteur est revenu avec KFC. » Au final, deux fast-food devraient s’implanter le long de la RN106. Le KFC devrait être édifié au nord, à côté d’une pépinière, tandis que l’autre sera au sud, à côté du super U qui doit ouvrir en septembre. « Le permis de construire d’un KFC devrait être déposé d’ici 15 jours, trois semaines, précise Jack Dentel, le 10 avril. Celui de Burger King devrait être déposé en septembre. » Une rencontre a déjà eu lieu entre la municipalité et France Travail. « Entre Super U et les autres commerces, il devrait y avoir plus de 100 emplois créés, souligne l’élu. C’est 100 familles qui ne seront pas obligées d’aller à Alès ou Nîmes pour trouver du boulot. »

Un McDo dans la Vaunage depuis décembre

La Calmette compte 2 516 habitants. C’est peu. Mais ce n’est pas elle qui aura le titre de plus petit village gardois abritant une grosse chaîne de fast-food. C’est Langlade, 2 265 habitants, qui le possède. McDo a ouvert un fast-food le 3 décembre 2024, dans cette commune de la Vaunage. Il a été construit sur un terrain privé, derrière un supermarché Lidl. Il n’a pas été ouvert par le même franchisé que celui de Saint-Geniès.

L’emplacement est stratégique. Langlade se trouve sur le très embouteillé axe Nîmes-Sommières. « Il y a entre 30 000 et 35 000 voitures qui passent par jour », explique Gaëtan Prévoteau, le maire. Le rond-point au-dessus duquel le Mc Do est placé, permet aussi d’emprunter la D14 pour rejoindre Bernis et la très fréquentée RN96. Environ 5 000 voitures empruntent chaque jour cet itinéraire bis. « Nous sommes à la fois un petit village et une grande ville », résume le maire.

Cela fait un moment que McDonald’s convoite cet axe clef. En 2011, une société avait fait une demande de certificat d’urbanisme auprès de la mairie de Saint-Dionisy, village qui comptait alors moins de 1 000 habitants. Le maire de l’époque, Michel Gabach, se rend vite compte que le projet est d’ouvrir un McDo sur une parcelle privée. « Je n’avais pas donné suite à leur demande. Il y a eu une manifestation. Même les jeunes m’avaient dit : « si on veut aller au McDo, il y en a déjà un à Milhaud », » se souvient-il. « La population avait coupé la RD40 », se remémore Jean-Christophe Grégoire, le maire actuel. « Comme McDo n’aime pas la mauvaise publicité, ils ont remballé leurs affaires », sourit Michel Gabach.

Création d’emplois

« Les gens peuvent assimiler McDo à la malbouffe. C’est une question de choix. On ne va pas vous mettre un couteau sous la gorge pour aller manger à McDo, KFC ou Burger King !, argumente Gaëtan Prévoteau. À un moment donné, ce que je vois, c’est que ce sont 40 emplois créés. Alors que la Verrerie du Languedoc qui employait 160 personnes à Vergèze va fermer. » Il évoque aussi cette ZAC de 45 logements qui ne parvient pas à sortir de terre sur sa commune. « Le BTP est en crise. Ce n’est pas le rêve de travailler à McDo mais à un moment donné, c’est un salaire et c’est important », tranche-t-il. « Nous avons une quarantaine d’employés à ce jour, précise Mathilde Martin, responsable de ce McDo. Ce ne sont pas tous des temps pleins car nous avons aussi des contrats étudiants. »

Le maire estime que cela permet aux jeunes qui ont des études à payer, « d’avoir une paie et une expérience de travail ». Cela pourrait même « rebooster » des jeunes pas très motivés par l’école. En tout cas, il assure que tous ses emplois ont bénéficié à des habitants de la Vaunage.

Pas de bistrot mais un McDo

Dans le village, il n’y a pas de café ou de brasserie qui peut se plaindre de l’arrivée du géant américain. Le bar a fermé en 2015. La mairie a acheté la licence IV pour qu’elle ne quitte pas la commune. Propriétaire des locaux de l’ancienne gare, elle aimerait la transformer en café-restaurant. Mais il faudrait éventuellement l’agrandir. « On a un permis de construire, purgé de recours et on va lancer un appel à manifestation d’intérêt », confie le maire. La mairie souhaite rester propriétaire des locaux qui seraient loués via un bail emphytéotique. « La gare est sur la voie verte qui va s’étendre jusqu’à Nîmes. Et, à part à Congénies, il n’y a pas de lieu pour se rafraîchir », observe l’élu. L’idée est que le restaurant de la gare puisse proposer des crêpes, gaufres, glaces en journée.

Le Burger King sera juste à côté du lycée Jacques-Prévert de Saint-Christol. • Sabrina Ranvier

Un burger King en construction à Saint-Christol-les-Alès

Il faudra moins de cinq minutes aux lycéens pour rejoindre le futur Burger King de Saint-Christol-les-Alès. Le projet est bien plus avancé que celui du Burger King de La Calmette. Le permis de construire a été accepté et est affiché le long de la route départementale. En ce mois d’avril, le bruit des tractopelles et des camions résonne dans la future zone d’activité « Les prés verts » située face au lycée… Jacques-Prévert. Ce fast-food, d’une surface de plancher de 421 m2, sera le second Burger King de l’agglomération alésienne. Le spécialiste des « onions rings », les beignets d’oignons, a ouvert son premier fast-food gardois en 2016 à Nîmes Cap Costières. L’année suivante, il en ouvre un second à Nîmes. Il s’installe ensuite à Alès et Bagnols-sur-Cèze. Saint-Christol est sa première implantation en dehors d’une grosse ville. Avec ses 7 115 habitants, cette commune est un « gros » village mitoyen d’Alès. Le groupe Bertrand, également propriétaire de Burger King, avait racheté la chaîne Quick en 2015. C’est pour cela qu’en 2017, le Quick de la route de Beaucaire a été remplacé par un Burger King. En 2020, patatras, le Quick historique installé sur l’esplanade nîmoise ferme. Cet emplacement de prestige, qui abrite des fresques du peintre Claude Viallat, a été récupéré par Colombus café. Quick ne compte aujourd’hui que trois fast-food dans le Gard : deux à Nîmes et un à Alès. La chaîne a-t-elle été mise KO par la concurrence ? Que nenni. Elle a été rachetée par un groupe américain. Et, après une période de marasme, elle a recommencé à ouvrir des restaurants. Dans un article paru le 16 mars 2025, le journal Les Échos indique que Quick viserait « 300 restaurants en France en 2028 » et aurait un projet d’ouverture en 2025 à Montpellier.

Sabrina Ranvier

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