ALÈS EN FERIA Morenito de Aranda arrache une oreille à la course de Yonnet
Corrida du souvenir en hommage à Hubert Yonnet (Christophe les 1, 2 et 4, Hubert les 3, 5 et 6)) pour Morenito de Aranda (salut et oreille), Luis Gerpe (salut et salut) et Tibo Garcia (silence et silence).
Du sang Pinto Barreiros… Les Yonnet sont connus pour ça et pour leur emblématique propriétaire, Hubert, un des anciens rois de la Camargue. C’est lui qui verra se présenter en Espagne, dans les arènes de Barcelone le 21 juin 1987, ses toros. La consécration ne tarde pas car le 4 août 1991 c’est Las ventas (Madrid) qui ouvre ses portes au fer camarguais. C’est la première ancienneté pour un élevage français. Depuis le décès d’Hubert Yonnet en 2014, c’est sa petite fille Charlotte qui est à la tête de la ganaderia.
Alès voulait rendre hommage au grand homme qu’il fut et faire découvrir l’actuelle ganadera au public qui ne la connaîtrait pas encore. Ici, on fait des choix forts et on les assume.
Apodéré par Jean-François Pilès, Morenito de Aranda, chef de lidia de cette course dite « dure », est conscient de cette responsabilité. Dans le coin on le connaît et on l’aime bien, notamment grâce à quelques belles sorties du côté de Saint-Martin-de-Crau ou encore de Céret. Il est habitué de ce type de course. Morenito de Aranda s’arrime encore une fois pour réaliser quelques séries du plus bel effet devant un toro qui, au début, était fixé dans les planches mais que l’Espagnol a su tirer des barrières pour le valoriser le rapprocher du centre du ruedo. Sérieux, le piéton est applaudi avec intérêt par l’aficion présente.
Morenito de Aranda fête ses 20 ans d’alternative l’année prochaine, c’est dire les recours techniques et les bagages qu’il a avec lui quand il est en piste. On ne peut pas durer dans le milieu sans les qualités qui vont avec. Devant le quatrième toro de la course, l’oreille va enfin tomber du palco après la scène émouvante d’un toro bravo qui avance et fait le tour de la piste sur ses quatre pattes, bouche fermée et sous les applaudissements d’un public connaisseur. Pourquoi ? Le toro avançait l’épée en très bonne mais l’encaste et la race de ce bicho ont tenu son moral jusqu’au bout. Un toro de combat comme on aime les voir. D’ailleurs, il s’était aussi illustré au cheval ! A la muleta ? Relativement noble il a permis à Morenito de Aranda a fait du Morenito de Aranda. Un toreo simple, fort et efficace. Un toro qui justifie pleinement l’organisation d’une telle course.
Luis Gerpe est le moins connu du cartel. L’aficion gardoise a pu le voir plus jeune, aux arènes de Nîmes, remporter une masterclass il y a quelques années alors qu’il évoluait encore en novillada sans picadors. Sa présentation alésienne le verra lui aussi s’arrimer. Il avait dit à qui voulait l’entendre qu’il voulait toréer cette corrida de Yonnet, le voilà devant. L’Espagnol met du temps à trouver le bon sitio et la bonne cadence. Il faut dire que son adversaire est coriace et qu’il exigeait rigueur et concentration pour éviter la mise en faute. Gerpe ne partira pas dans la roubine et donnera de l’air au toro avant de le resserrer petit à petit. Une série dans ses terrains de prédilection, la suivante dans ceux du toro. Une très grande épée n’y fera rien, le public est resté assez froid en fin de duel. Salut.
A 30 ans, le natif de la province de Tolède n’a pas démérité face au cinquième de la tarde. Comme ses compagnons de cartels il n’a pas failli à la réputation des matadors de toros qui se lancent ce type de défi. Les belluaires n’ont pas triché. Cela ne l’empêche pas d’esquisser en fin de faena de très belles séries droitières, pieds joints et face aux cornes.
C’est au tour de Tibo Garcia de fouler le sable de la piste du Tempéras. Pour ce Nîmois, c’est un quatrième paseo. Lui qui a pris son doctorat à Saint-Gilles en 2019 veut se remettre dans le bain pour continuer une saison importante pour lui. S’il n’est plus apodéré par l’empresa alésienne Didier Cabanis, Tibo a accepté ce pari un peu fou mais qui a du sens. Devant son Yonnet le Nîmois ne déméritera pas, il ne s’est jamais départi de l’envie d’aller chercher le toro, sur la main droite où il a par ailleurs été convainquant et efficace, chose qui a plu aux tendidos mais qui a dû coûter au moral du toro qui n’a pas suivi et s’est éteint en début de faena. Plusieurs envois à l’épée empêchent un quelconque trophée. Silence.
Cette corrida de Yonnet coûte fort logiquement cher aux jambes comme à la tête du torero. Il faut se les cogner ces cornus ! Mais cette corrida est aussi pour lui la possibilité de faire comprendre à qui le regarde qu’il est un torero accompli, professionnel et sur lequel on peut compter en toute circonstance. Suave au capote, Tibo brinde son exemplaire à Manolo Vanegas et attaque à droite avec trois séries qui remettent un peu de vie sur les étagères. Tête froide et main basse, Tibo essaie et arrive à débloquer la situation mais c’est encore l’épée qui lui coûtera cher. Dommage que l’essai ne soit pas transformé mais Tibo n’a pas à rougir. Silence.