FAIT DU JOUR À Alès, la "fourmilière organisée" de La Poste en ébullition avant Noël
Depuis le "Black Friday" et avec la perspective de Noël en approche, l'effervescence règne dans les centres de tri de La Poste. C'est évidemment le cas à la plateforme services-courriers-colis d'Alès qui n'a pas échappé à l'explosion du e-commerce. Chaque jour, 5 000 colis sont distribués. Dans les pas d'un facteur aux allures de Père Noël. Reportage.
Tous les jours, c'est la même rengaine. Dès 4 heures du matin, les premiers camions débarquent sur le quai du centre de tri alésien de La Poste, établi au cœur du parc d'activités Pist Oasis, dans le quartier du Rieu. Pendant deux bonnes heures, les agents de la plateforme services-courriers-colis réceptionnent les envois acheminés depuis la plateforme logistique régionale située à Cavaillon.
Tous les colis sont scannés par des flasheurs pour assurer une traçabilité optimale. S'en suit une fastidieuse phase de tri, avant le chargement des véhicules pilotés par les facteurs qui démarrent alors leur tournée. Un ballet millimitré au sein des 500 mètres carrés de locaux dédiés aux colis, ou plutôt "une fourmilière organisée". "Chacun s'exécute au sein de son alvéole. Tout le monde sait ce qu'il doit faire. Le système est rôdé depuis des années. On l'ajuste d'un an sur l'autre en tenant compte des retours des facteurs. C'est une mécanique bien huilée", note Patrice Bert, responsable d’équipe, qui nous ouvre les entrailles de la plateforme ce mercredi 22 décembre.
Noël est en approche, et c'est une période pour le moins charnière pour le groupe La Poste. Cette "peak period", autrement dit "la haute saison", a même démarré depuis le mois de novembre avec le fameux "Black Friday". "On a atteint le pic ce mercredi, à partir de demain (ce vendredi) ça va redescendre", précise l'ancien facteur. Et pour cause ! Puisqu'il faut en théorie deux jours post-commande pour se faire livrer un colis (à moins de faire appel à Chronopost et sa livraison en 24 heures), la date butoir pour espérer avoir son cadeau au pied du sapin le 24 au soir est désormais dépassée.
"Le 24 décembre, le centre est ouvert jusqu'à 18h30. Les colis du jour peuvent être récupérés par le client s'il n'était pas chez lui au moment de notre passage. On essaie d'être arrangeant", expose Patrice Bert. Pour supporter le doublement de l'activité, qui fait passer le nombre de colis traités de 2 500 à 5 000, le dernier nommé a renforcé ses équipes. Chaque année depuis 2020 et l'explosion des achats en ligne en raison de la pandémie, une dizaine de recrutements en CDD sont opérés fin-octobre localement.
C'est à nouveau le cas en 2022 puisque 13 saisonniers ont rejoint les 110 collaborateurs de la plateforme services-courriers-colis d'Alès. Après des volumes de colis exceptionnels sur la fin d’année 2020 en raison des restrictions sanitaires liées au Covid, La Poste constate le retour d’une croissance à la normale imputable à la réouverture des commerces physiques. Ainsi, de novembre à décembre 2022, La Poste prévoit de trier et distribuer 100 millions de Colissimo, soit un volume similaire à la fin d’année dernière et une augmentation de 25 % par rapport à 2019 avant les confinements (ce qui n'a pas compensé la chute libre du pli postal : 18 milliards distribués en 2008, moins de 7 en 2022).
Dans le Gard, les établissements alésiens contribuent hautement à cette desserte en couvrant une zone étendue de Lédignan au sud à Génolhac au nord, et de Ganges à l'ouest à Barjac à l'est. Soit 65 000 adresses desservies, ce qui représente environ 200 000 personnes. Ainsi, la tâche qui incombe aux facteurs alésiens est lourde. Et les erreurs doivent rester marginales. "Le maître-mot, c'est la satisfaction client. Tout le monde doit recevoir son cadeau pour Noël", insiste Guillaume Mancera, responsable des relations médias pour La Poste en Occitanie.
Mais, de l'aveu de Patrice Bert, "on n'est pas à l'abri que des colis se perdent". Surtout lorsque ces derniers sont sans adresse ou affublés d'une adresse incomplète. Ceux-ci sont alors expédiés à Libourne où La Poste dispose d'un service dédié au traitement de ces "paquets volants". "Les colis sont ouverts et les agents tentent de trouver la meilleure alternative pour retrouver le destinataire ou tout au moins l'expéditeur", assure le responsable d'équipe.
Le plus souvent, ça n'arrive pas ! Et le client reçoit son présent. "Vous faites partir un colis de Brest, deux jours après il est chez vous à Alès", s'émerveille Guillaume Mancera. Et l'attaché de presse de paraphraser son PDG, Philippe Wahl : "Chaque jour, on fait un petit miracle !" Parmi les faiseurs de rêves, Jean-Régis, facteur alésien depuis 2015, que tout le monde appelle Guillaume en raison d'une confusion administrative.
Ce jeudi matin, après avoir participé à la phase de tri des colis de 6h30 à 8h30, le jeune homme se rapproche du quai où est stationné son véhicule jaune à faibles émissions (notre encadré). Aidé d'un chariot de transport, Jean-Régis charge jusqu'à 160 colis à l'arrière de l'utilitaire en les classant astucieusement. "J'essaie de mettre les colis qui vont partir les premiers le plus près de moi", fait savoir le dernier nommé.
Muni d'un smartphone sur lequel il peut dérouler les instructions, comme tous les agents, le facteur s'élance pour une tournée de plusieurs heures dans les rues d'Alès. SA tournée. L'Alésien la connaît sur le bout des ongles. Du centre-ville à la grand-rue Jean-Moulin, jusqu'à l'autre rive du Gardon, dans les quartiers de Rochebelle, Cauvel et La Royale. Son premier colis de la matinée est suffisamment volumineux (les colis de plus de 30 kilos ne sont pas traités par La Poste) pour devoir être transmis en mains propres à un habitant de la place Gabriel-Péri.
Au pied de l'immeuble, Jean-Régis sonne. "Si ça ne répond pas à la sonnette, on a le numéro du client sur le colis. Ou alors on le trouve sur l’application Colissimo en flashant le code barre", confie le facteur. En théorie, le client a été prévenu en amont par un message l’informant qu’il va être livré sous peu. Lorsqu'on y ajoute l'impatience de recevoir ses achats de Noël, rares sont ceux qui n'ouvrent pas leur porte au facteur. "Quand c'est un cadeau, on voit le sourire s'afficher sur les visages des gens qui nous disent 'J'attendais ça !' On a parfois l'impression d'être le Père Noël", sourit Patrice Bert, ancien facteur.
Le facteur, un tiers de confiance sans égal. "Ils sont parfois attendus comme le loup blanc !", veut croire Guillaume Mancera. "Le facteur, c'est le deuxième personnage préféré des Français derrière le boulanger. Pour beaucoup de seniors, c'est le seul contact de la journée. Quand il sonne, on le fait rentrer facilement chez soi", poursuit-il. Surtout s'il porte sa tenue identifiable frappée du logo oiseau-flèche bleu de La Poste. Une théorie vérifiée à l'occasion de la tournée matinale de Jean-Régis.
Dans la cage d'escalier d'un immeuble alésien, alors qu'il vient de franchir le seuil de la porte d'entrée grâce à son badge universel, le facteur tombe nez-à-nez avec un client qui se trouve être celui à qui il s'apprêtait à remettre un gros paquet. Tout heureux, le retraité se saisit du colis et glisse quelques pièces de monnaie dans la poche de notre "héros du jour". "Ça arrive tout le temps en cette période. Et c'est souvent des jeunes qui donnent !", commente après coup l'intéressé.
De retour au volant de son véhicule, Jean-Régis a déjà identifié le prochain paquet à distribuer. Il est tout petit et sera simplement glissé dans la fente de la boîte aux lettres. Contrairement aux idées reçues, à l'échelle locale, les cartons du géant Amazon ne représentent "que" 7% des colis distribués. Le coffre de la voiture du facteur alésien est assez représentatif de cette réalité.
"Ce qui me fait peur en cette période de vacances scolaires, c'est que ça soit un enfant qui m'ouvre la porte alors que j'ai potentiellement son cadeau dans les mains. Lorsque ça arrive, il faut se débrouiller avec le client pour dissimuler le cadeau", développe Jean-Régis quelques hectomètres plus loin. Ce jeudi, le jeune homme n'a pas commis de bévue. Et la magie de Noël a une fois de plus été préservée...
Et aussi...
Libourne, c'est aussi la ville qui abrite le fameux secrétariat du Père Noël, lequel fête ses 60 ans cette année. Là-bas, 60 petits "lutins" vêtus aux couleurs de La Poste répondent aux lettres des enfants ayant formulé leurs vœux avant le 20 décembre. En un mois, les disciples du Père Noël auraient traité un million de missives.
Le saviez-vous ?
La Poste possède la première flotte de véhicules électriques d’Europe avec plus de 37 000 véhicules électriques (véhicules utilitaires, vélos, scooters à trois roues et quads). Plus de la moitié des tournées (54 %) sont effectuées en véhicules à faibles émissions. "Quand les facteurs ont goûté aux véhicules électriques, ils ne veulent plus revenir aux thermiques", confie Guillaume, faisant valoir le confort des boîtes automatiques.
La Poste se réinvente
Pour compenser ses diverses baisses activités en partie liées à la dématérialisation des démarches administratives, La Poste se réinvente : visites à domicile, portage de repas et de médicaments, sessions du Code de la route... Le groupe s'est même mis à réaliser des audits de voirie au profit des collectivités. Certaines voitures des facteurs sont équipées d’une caméra qui analyse l’état des routes et les fait remonter aux communes. Ingénieux !