Le site somptueux de celui qui guide les marins depuis plus de 150 ans a été culturellement et touristiquement éco-valorisé pour 2,7 millions d’euros subventionné à 80%. Après avoir déambulé le long du platelage en bois au-dessus des dunes, qui débouche sur ce totem magnifique, planté dans le sable, les 300 personnes présentes ont assisté à une ode au phare du bout du Gard. Sans les citer tous, ou presque... Robert Crauste, le maire du Grau-du-Roi, a rendu hommage aux plus de deux-cent acteurs de cette rénovation. 

Chaîne humaine

Mais également à ceux qui ont été les gardiens du phare. Les familles Gandofle, Houny ou Djalel. « J’étais le médecin traitant de Robert Djalel. Lorsque je venais le visiter ici, il m’appelait « toubib » et bien entendu c’est lui qui faisait l’ordonnance… », se souvient Robert Crauste, avant de faire un hommage appuyé à la beauté fragile de cette Camargue qu’il chérit tant. Lors de sa construction par Charles Dupuy à la fin du XIXe siècle, l’axe de la tour du phare de l’Espiguette se situait à 155 mètres précisément de la mer, en atteste cette inscription sur le bâtiment principal.

Aujourd’hui, la Grande bleue s’est retirée à plus de 700 mètres et le vieux gardien à la lanterne avait bien vieilli. L’État, propriétaire de l’édifice, et le conservatoire du littoral, ont confié la maîtrise d’ouvrage à la commune du Grau-du-Roi en 2015. Un projet considérable. La lumière des naufragés de l’Espiguette a aujourd’hui recouvré sa superbe en devenant accessible au public. « Sur l’ensemble du territoire, le Conseil départemental agit aux cotés des communes pour améliorer le service public auprès des Gardoises et des Gardois, pour valoriser le patrimoine naturel et historique de notre département tout en renforçant son attractivité. La réhabilitation du site du phare de l’Espiguette en est un bel exemple. Le Conseil départemental est fier d’y avoir contribué», indique Françoise Laurent-Perrigot, présidente du Conseil départemental du Gard.

Un site à part entière

« Le Grau-du-Roi a ceci d’unique d’être une commune littorale où demeurent deux phares inscrits et classés au titre des monuments. Ce projet devait concilier impératif de préservation d’un milieu naturel sensible, réhabilitation d’un patrimoine bâti du XIXe, et réception du public dans un bâtiment qui continue à remplir sa fonction de signalisation. Ce n’est que le commencement d’une nouvelle ère pour le phare de l’Espiguette, l’ère de l’écotourisme», explique Robert Crauste. Les visiteurs peuvent découvrir un musée de 200 mètres carrés et une boutique avant de gravir les 111 marches de cette magnifique tour de 27 mètres. C'est Maud Hubidos, directrice de station SPL Le Grau-du-Roi Développement, qui ajoute à sa charge, la direction de ce site. 

Un escalier en colimaçon débouche sur la lanterne des marins perdus et la terrasse, qui offre une vue à couper le souffle sur la baie d’Aigues-Mortes. 360 degrés de patrimoine camarguais entre dunes et marais. La visite de la tour du phare est limitée à 10 personnes. Mais pour ceux qui ont le vertige ou les personnes à mobilité réduite qui ne peuvent gravir les 111 marches, pas de panique. Une salle vidéo à 360° est prévue dans le musée, comme si on y était… en haut du phare !

Délicat équilibre dunaire

À l’heure où la mer reprend ses droits au Grau-du-Roi, mais s’est retirée à cet endroit précis, la ville a souhaité revaloriser culturellement le site tout en préservant la biodiversité environnante. 400 mètres de passerelles en bois sur pilotis permettent un cheminement pédestre parmi les dunes et la biodiversité du site, du parking actuel et de la plage, jusqu’au phare sentinelle camarguais. Des ganivelles et de la terre ont été ajoutées près du parking afin de préserver le délicat équilibre du cordon dunaire. Le visiteur averti pourra admirer les vestiges d’un blockhaus entièrement détruit qui gît à quelques pas d’un autre bloc de pierre construit pendant la Seconde Guerre mondiale, incroyablement bien conservé. Une vieille grange abandonnée a été restaurée et abrite aujourd'hui l’accueil et la boutique du site. Les anciens appartements des gardiens du phare ont été transformés en un musée retraçant la vie du vieux guide des mers et l'histoire de la baie. « Profitez de cet instant, respirez à plein poumon l’air du large, humez les senteurs du sable et de l’iode », a conclu Robert Crauste dans une envolée lyrique. Le gardien de la baie d’Aigues-Mortes ajoute une nouvelle corde à son arc, entame une nouvelle vie dans l’histoire et la transmission.