« C’est bien, c'est propre, le cuisinier est au top et le service impeccable ». Hassan est un des clients de ce restaurant nîmois pas comme les autres et il en est pleinement satisfait. Au premier abord, « Su Casa » est semblable à bien des établissements, avec un accueil, des tables, une cuisine, des repas et des clients. Mais la différence se fait au moment de quitter le lieu. Il n’y a pas de facture, pas de note et pas de caisse. Le client laisse la somme qui veut ou qu’il peut, dans une boîte métalique fixée à un mur, proche de la sortie. Le but étant de laisser au minimum une participation symbolique. Le premier contact se fait, à l’entrée, avec Chantal : « Je suis polyvalente et je note le nom des clients, juste pour comptabiliser les repas. J’aime le contact avec les gens. En discutant, on se rend compte de la misère autour de nous. C’est symbolique, mais on les aide moralement ».

41 000 repas servis en 2023

En 2023, le restaurant « Su Casa » a servi 41 000 repas et cette année, la moyenne est de 120 clients par services (onze services par semaine). Le concept, qui existe depuis trois ans, est original et surtout basé sur des valeurs de générosité : « Initialement, c’était pour les personnes hébergées par le 115 et la Croix-Rouge. Le but est de proposer un espace de légèreté autour de l’alimentation pour que les gens dans le besoin puissent se nourrir. Il y a une dimension sociale et c’est non excluant. On accueille tous types de personne et de parcours de vie. Je suis content de contribuer à améliorer leur situation. On se doit d’être solidaire », explique Mourad Berrada, le responsable de l’espace de restauration porté par la Croix-Rouge.

Des fruits et des légumes achetés au Mas de agriculteurs

"Su Casa (NDLR, "Sa maison" en espagnol) est ouvert à tout le monde et les sommes récoltées permettent de mettre un peu de beurre dans les épinards (et acheter des denrées). La structure, financée par des fonds publics, fonctionne avec quatre salariés à temps plein, une personne en alternance, une à temps partiel et 50 bénévoles. Le concept n’exclut pas la qualité et le tiers-lieu achète des fruits et légumes au Mas des agriculteurs. "Chaque individu a le droit de manger convenablement. On oublie parfois qu’une personne malade coûte plus cher qu’une personne bien nourrie, c’est pour cela que nous travaillons avec le pôle santé de la ville de Nîmes", abonde Mourad Bourrada.

Mourad Berrada : « On n’est pas fier d’avoir du monde »

Le restaurant a aussi vocation à créer un lien social et les clients viennent pour échanger. Pour les salariés et les bénévoles, l’expérience est enrichissante : « Ça me remplit de bien-être. Je tente de prendre un peu de recul pour ne pas avoir trop de compassion et je discute avec certains », atteste Anne-Marie qui fait la plonge et parfois le service. Tout le monde y trouve son compte, mais paradoxalement l’un des restaurant nîmois qui attire le plus de clients ne peut pas s’en satisfaire. « On n’est pas fier d’avoir du monde », conclut Mourad Bourrada. Ici pas d'étoile, pas d'avis google et pas de paillettes, mais de la générosité en quantité garstronomique.