Publié il y a 1 an - Mise à jour le 12.11.2023 - Thierry Allard (avec C.Mo., C.Mi., Y.P., S.Ma.) - 6 min  - vu 2670 fois

FAIT DU JOUR Marches contre l’antisémitisme : les politiques gardois se positionnent

Tagues Antisemites representant

Fin octobre, des étoiles de David ont été taguées sur des bâtiments du 14e arrdonissement de Paris, un acte considéré comme antisémite

- ©Julien Mattia / Le Pictorium/MAXPPP

Dans un contexte de recrudescence des actes antisémites, la grande marche contre l’antisémitisme organisée ce dimanche à Paris à l'initiative des présidents du Sénat Gérard Larcher (LR) et de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet (Renaissance) sera l’événement de ce dimanche. Localement, une marche est organisée à Nîmes, à l’appel de la Licra.

Alors que la participation du Rassemblement national (RN) à la marche de Paris a créé la polémique à gauche de l’échiquier politique, Objectif Gard a sondé le personnel politique gardois. Participeront-ils à une marche ce dimanche ? Quel est leur positionnement vis-à-vis de la participation du RN et de la décision des élus de La France Insoumise de ne pas y participer ? Tour d’horizon.

À Gauche, LFI isolée

À Gauche, les clivages se retrouvent aussi dans le Gard. Ainsi, le député LFI de la 5e circonscription du Gard Michel Sala est clair : « Dimanche, je ne serai pas à Paris mais dans le Gard (…) De toute façon, je ne participerai jamais à une manifestation avec des gens antisémites comme le Rassemblement national. Les fondations de ce parti sont antisémites ! » L’ex-président du FN Jean-Marie Le Pen ayant été condamné à six reprises par la justice pour négationnisme ou propos antisémites, rappelle-t-il en passant. Et Michel Sala d’affirmer que s’il devait participer à un rassemblement, « ce serait pour demander un cessez-le-feu à Gaza. »

Michel Sala, député de la cinquième circonscription du Gard. (Photo : S.Ma/ObjectifGard)

Une position que le conseiller régional et président PS de la Communauté de communes du Pays d'Uzès Fabrice Verdier trouve « incompréhensible. Cette manifestation n’a qu’un sens : être unis face à l’antisémitisme. Là, il faut être là. Alors minauder comme le fait LFI pour de basses raisons tactiques et politiques, ce n’est pas à la hauteur. » Sur sa lancée, le socialiste estime que « La NUPES est morte, c’est une bonne nouvelle pour le pays et pour la Gauche. »

Manifester dimanche, c'est donc non pour l’élu LFI, mais oui pour les élus socialistes. La première d’entre elles, la présidente de la Région Carole Delga, sera à Perpignan pour manifester car « Il est plus que temps de dire ensemble non et de mettre en lumière celles et ceux qui luttent avec courage et détermination contre ce fléau. » Précision : la présidente de la Région ne participera pas le matin au rassemblement prévu par le maire RN de la ville, Louis Aliot, mais à une autre marche, l’après-midi. Plus localement, Fabrice Verdier considère lui aussi que « c’est important d’y être, que nous soyons nombreux dans la rue pour lutter contre cet antisémitisme rampant qui revient et nous rappelle des souvenirs nauséabonds, tragiques. Parfois, il est très utile de venir réaffirmer des principes. »

Le président de la CCPU et conseiller régional Fabrice Verdier (Photo : Objectif Gard)

La présence du RN ne gênerait donc pas les socialistes ? « Il ne faut pas oublier ce qu’est le Rassemblement national, rien n’a changé, ce n’est pas parce qu’on a repeint le salon que l’intérieur de la maison est différent, estime le président de la Communauté de communes Beaucaire Terre d’Argence Juan Martinez. Je trouve qu’on leur fait trop de publicité gratuite, encore une fois. Les gens ne doivent pas être dupes. » De son côté, Fabrice Verdier considère que « sur la présence du RN, chaque citoyen est libre, mais je n’aurais pas fait comme Olivier Faure en invitant le RN à défiler à nos côtés. C’est une façon de le banaliser et de le dédiaboliser. Après, chacun est libre de venir, si les élus et les électeurs du RN veulent affirmer qu’ils luttent contre l’antisémitisme, ça ne me pose aucun problème. »

Carole Delga, elle, veut croire « qu’il existe toujours une grande majorité de nos compatriotes qui refusent en conscience l’idéologie mortifère de l’extrême-Droite qui s’est toujours nourrie de la haine de l’autre, tout comme ils rejettent toute forme de faiblesse ou de compromis avec l’intégrisme ».

« Depuis quand ce que dit le FN fixe notre pensée ? »

Du côté de la majorité présidentielle, le président de l’Agglomération du Gard rhodanien Jean-Christian Rey ne manifestera pas, retenu par des obligations personnelles. Mais de toute façon, « le problème aujourd’hui avec ces marches, c’est qu’on a l’impression qu’elles s’opposent, alors qu’elles devraient s’additionner. Or il faut trouver des solutions ensemble », estime-t-il. Le Bagnolais, qui pense qu’il faudrait « des personnes de bonne volonté » pour régler ce conflit, en prenant l’exemple de la fin de apartheid en Afrique du Sud, défend une position équilibrée : « Bien sûr qu’il faut condamner le Hamas et ses actes terroristes, mais on ne peut pas accepter d’un État qu’il se venge. »

Jean-Christian Rey, président "Renaissance" de l’Agglo de Bagnols (Photo : Nicolas Dhombres)

Quant à la présence du RN, « jamais le FN (sic) n’a guidé mes actes, tonne-t-il. Le FN est un parti clairement là pour rejeter les autres, qui prône l’exclusion et le rejet. L’antisémitisme fait partie de leur fonds de commerce. C’est bizarre qu’ils y soient, mais ce n’est pas parce qu’ils y sont que j’irai ou pas. Demain, si le FN dit que la paix c’est bien, nous serons contre eux pour dire que ce n’est pas bien ? Depuis quand ce que dit le FN fixe notre pensée ? » Et sur LFI, Jean-Christian Rey pense à peu de choses près la même chose que Fabrice Verdier, à savoir que « LFI a de gros problèmes internes et qu’ils se servent de ça pour régler leurs comptes. »

La Droite se mobilise

À Droite, le discours est unanime : on y va ! « Nous devons être tous unis pour protéger ceux de nos concitoyens, qui par leur religion sont aujourd’hui menacés par ceux qui veulent importer en France les conflits étrangers, affirme le président LR de Nîmes métropole Franck Proust. J’invite les 104 élus du conseil communautaire de Nîmes Métropole à répondre favorablement à l’appel au rassemblement ce dimanche 12 novembre à 11h45 sur le parvis de la Maison Carrée. »

Pascale Bories, maire de Villeneuve-lès-Avignon • Photo : Nicolas Dhombres

Même son de cloche chez Pascale Bories, maire de Villeneuve-lès-Avignon : « Je ne suis pas sûre de pouvoir y être, mais je soutiens pleinement ces rassemblements. Je crois qu’aujourd’hui, nous devons tous nous rassembler, quelles que soient les opinions politiques, religieuses. » Quant à la présence du RN à la manifestation, elle ne choque pas la maire de Villeneuve : « Aujourd’hui, il s’agit de Français qui se rassemblent pour éviter une montée de la haine, notamment antisémite, peu importent les obédiences et les opinions politiques. »

Le maire divers droite d’Uchaud Joffrey Léon a décidé lui aussi d’en être : « Malgré mon emploi du temps chargé, même un dimanche, je participerai à la manifestation. Les citoyens juifs de notre pays ont toujours été partie intégrante de notre histoire, et ils ne devraient pas subir les conséquences des actions de l'armée d'Israël. De même, les musulmans ne devraient pas être affectés par les actions du Hamas. »

Le sénateur Laurent Burgoa Photo : AS/Objectif Gard

Il y en a toutefois un à Droite qui n’y sera pas : le sénateur LR Laurent Burgoa. « Moi je ne pourrai pas être à Paris, annonce-t-il. J’y suis toute la semaine prochaine. Je suis Gardois également ! Il y a bien un rassemblement à Nîmes mais il est organisé le matin. Vous savez que le dimanche matin, j’ai un loisir : la chasse. Toutefois, je trouve que c’est une excellente initiative de la part de la présidente de l’Assemblée nationale et du président du Sénat. »

Le RN se dit « à sa place »

Enfin, à l’extrême-Droite, le député RN de la 4e circonscription du Gard Pierre Meurin y sera. « Je me rends à Paris plein de la conviction que je suis à ma place dans cette marche », affirme-t-il. Et le député d’expliciter sa position : « C'est une marche républicaine contre l'antisémitisme, un phénomène qui a muté. Il ne ressemble en rien à celui du début du XXe siècle. L'antisémitisme d'aujourd'hui est clairement corrélé à l'Islam politique et à l'islamisme. Ce faisant, nos compatriotes juifs ont besoin de soutien. » Une position rejointe par son homologue de la 2e circonscription du Gard Nicolas Meizonnet, lui aussi encarté au RN : « Les élus du RN sont en première ligne pour combattre et dénoncer un islamisme grimpant qui avance dans le pays avec la complicité de l’extrême-Gauche et qui sont la source de cet antisémitisme du XXIe siècle. »

Pierre Meurin, député de la quatrième circonscription du Gard. (Photo : S.Ma/ObjectifGard)

À sa place, donc, le RN, malgré les condamnations pour antisémitisme de son fondateur Jean-Marie Le Pen et le fait qu’un de ses fondateurs soit Pierre Bousquet, un ancien Waffen-SS de la division Charlemagne ? « Si on s’amusait à faire l’archéologie de tous les partis politiques, on trouverait des choses peu glorieuses notamment au Parti communiste dont M. Sala est proche, rétorque Nicolas Meizonnet. Alors bien sûr que c’est ma place d’être à Paris dimanche. Nous sommes un grand mouvement politique qui représente 40 % du corps électoral dont beaucoup sont de confession juive. »

Reste désormais à voir comment ces prises de positions se matérialiseront tout à l’heure à Paris. Les représentants du Parti socialiste, du Parti communiste et d’Europe écologie-Les verts ont prévu de manifester à Paris, mais d’y tendre un « cordon sanitaire » pour isoler le RN.

Thierry Allard (avec C.Mo., C.Mi., Y.P., S.Ma.)

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