Samedi 29 mars, trois résidentes en fauteuil roulant de l'Ehpad Henry Bellon de Fontvieille ont visité l'abbaye de Montmajour, jusqu'au sommet de la tour. Si ce monument historique est partiellement accessible aux personnes à mobilité réduite, de nombreux espaces, comme la tour, leur sont d'ordinaire totalement inaccessibles. Cette visite a été rendue possible par l'association Portez-moi pour un rêve, par l'association Sport-Santé du Pays d'Arles (ASSPA) qui a organisé la journée, et par la douzaine de sapeurs-pompiers qui ont bénévolement porté les résidentes. "À part les pompiers qui sont là aujourd'hui, ce n'est pas possible d'installer un ascenseur à l'Abbaye de Montmajour. Ce n'est pas que c'est une solution, c'est que les pompiers et les ambulanciers sont la seule solution. Parce que ce sont des professionnels, parce qu'ils connaissent le matériel, parce qu'ils ont l'habitude de transférer des personnes, et que s'il se passe quoi que ce soit ils sauront réagir. Ils ont l'habitude d'évacuer des gens. Donc tout est cohérent", estime le fondateur de l'association à l'origine de l'événement.

Portez-moi pour un rêve a été créée le 16 janvier 2023 par Nicolas Chevalier, après un long parcours du combattant. Ce drômois a d'abord été aidant avant de devenir ambulancier. "J'ai découvert le métier et j'ai tout de suite pu voir qu'il y avait beaucoup de choses à faire au niveau de la liberté pour les personnes parce que je rencontrais constamment des gens qui ne pouvaient jamais sortir de leurs maisons. Je trouvais cela injuste de les sortir uniquement pour aller voir le médecin ou pour aller aux urgences", raconte-t-il. Ce dernier a donc commencé à porter une personne afin qu'elle puisse aller manger au restaurant, et c'est ainsi que l'idée de l'association est née. "Pendant neuf ans, j'ai présenté le projet à des structures plus importantes, et on ne m'a jamais écouté", regrette-t-il. La première action de l'association s'est déroulée sur le plus haut donjon d'Europe, à Crest, dans la Drôme, le 29 juillet 2023. "C'était magnifique", se souvient-il avec émotion.

L'Abbaye de Montmajour n'est pas un lieu anodin pour l'association et son président. Après avoir réitéré l'expérience dans plusieurs monuments de la Drôme, du Val-de-Marne avec le château de Vincennes, ou encore de l'Hérault, l'association s'est rendue à l'Abbaye de Montmajour. Nicolas Chevalier rencontre alors Françoise, qui travaille au sein du monument depuis plus de 30 ans, puis Audrey Luciani, responsable de l'accueil et de la surveillance au sein de l'abbaye. "Elles ont adoré le projet, et quasiment deux mois après, une convention a été signée et cela a tout lancé", se souvient-il. L' Abbaye fait partie du centre des monuments nationaux (CMN), avec lequel l'association a alors été mise en contact. "Le CMN a une vraie volonté de faire changer les choses. Ce n'est pas juste une volonté politique, c'est une vraie intention. Deux ou trois mois après, on a signé avec le Fort Saint André à Villeneuve-lez-Avignon, et avec le château d'If à Marseille. Cela nous a ouvert des portes", se réjouit-il.

"Nous avons signé une convention en 2024 et nous venons de la renouveler en 2025. Cela inclus un nombre de visites à l'année avec la gratuité pour les personnes en situation de handicap et leurs familles", explique Audrey Luciani. Si l'accès à la culture pour tous est l'activité principale de l'association, les bénévoles oeuvrent également pour un "accès à la liberté", et pour permettre aux personnes en fin de vie de réaliser leurs souhaits. "C'est ce que j'aurais aimé pour mes proches", confie Nicolas Chevalier. "J'ai passé 9 ans à présenter ce projet et en moins de deux ans, on a fait 132 portages dans 36 monuments dans 5 régions et 14 départements français, et on m'appelle de toute la France, même de Corse", souligne l'ambulancier. Ce dernier est à la recherche de financements afin de pouvoir répondre à la demande. "Notre objectif est de faire 150 portages cette année et on y arrivera. Mais si je pouvais devenir salarié on en ferait minimum 500", estime-t-il. L'argent permettrait également l'achat de matériel, ainsi que d'un véhicule pour le transport des personnes à mobilité réduite.

Au départ, Nicolas Chevalier voulait créer une entreprise. "Mais en allant recueillir des témoignages, j'ai rencontré une mamie qui m'a dit qu'elle ne touchait que 500 euros par mois. Donc je me suis dit que je ne pouvais pas demander 50 euros à quelqu'un qui touche si peu", explique-t-il. Parmis ses prochaines actions, l'association organise un marathon de l'accessibilité du 8 au 27 avril. Elle sera également de retour à l'Abbaye le 28 juin.