FAIT DU JOUR Transmission de savoir-faire entre deux bouchers à Vallabrègues
Claude Monleau a été le boucher de Vallabrègues pendant près de 40 ans et sa boucherie familiale a ouvert ses portes en... 1918 ! Autant dire qu'elle était devenue une institution indispensable dans le petit village de 1 400 habitants. Alors pour l'installation du nouveau boucher, une transmission de savoir-faire était indispensable.
La famille Monleau et sa boucherie étaient installées rue de l’Hôtel de ville, au cœur de Vallabrègues. En plus des produits classiques, la boucherie était célèbre, bien au-delà de la commune, pour ses saucissons et ses andouillettes. Une recette originale de la famille Monleau et revisitée par Claude Monleau le représentant de la 4e génération de bouchers-charcutiers de la famille. Ce saucisson et cette andouillette au secret bien gardé ont conquis une énorme clientèle. « Jusqu'en 1939, mon oncle pouvait préparer 200 kg de saucisson par semaine. Il avait alors 11 employés. Des hommes étaient vannier le matin et charcutier l'après-midi », explique Claude Monleau.
Un saucisson qui est donc revisité, mais qui accumule des prix auprès du Saucicréor, le concours international du meilleur saucisson : huit récompenses au total, un palmarès impressionnant pour le saucisson de Vallabrègues ! Alors quand le boucher du village a voulu prendre sa retraite, il y a trois ans, Jean-Marie Gilles, le maire de la commune s'est mis à la recherche d'un nouveau boucher.
« Pour un petit village, comme nous, perdre un boucher, c'est perdre un service important », argumente l'élu. Avec l'aide de la Chambre de métiers et de l'artisanat du Gard (CMA 30), la municipalité s'est donc lancée dans la construction d’une Maison des artisans, avec notamment la création d'une boucherie-charcuterie aux dernières normes.
Le maire sait à quel point il est important que le nouveau boucher puisse se sentir bien à Vallabrègues. Dans les candidatures qu’il reçoit, c'est celle du jeune Théo Cuadrado qu'il va choisir. Le jeune boucher a passé un bac agricole à Rodilhan où une partie de sa famille possède un élevage. Son parcours se poursuit avec un BTS en gestion de domaine agricole.
« Toutefois, je voulais absolument assurer la transformation des produits de A à Z, alors je me suis lancé dans un CAP de boucherie », explique Théo Cuadrado. Ensuite, il passe trois ans à Digne-les-Bains en apprentissage, puis revient dans le secteur à Saint-Rémy-de-Provence et à Beaucaire. C'est en 2017 qu'il entend parler de Vallabrègues et de ce poste de boucher. Il vient voir et rapidement tout se passe bien, le boucher et son épouse Flora, sont motivés et très enthousiastes.
Le pari de la réouverture d'une boucherie traditionnelle au cœur de Vallabrègues est alors gagné, grâce notamment à l'aide matérielle de la commune. Toutefois, la boucherie Monleau était bien plus qu'une simple boucherie. Elle était l'endroit ou l'on savait préparer des saucissons et des andouillettes comme nulle part ailleurs. Avec une clientèle fidèle venant de loin et des médailles récompensant ce savoir-faire unique où les saucissons ont un goût de fumé caractéristique. Alors l'élu municipal a discuté avec Claude Moleau et pour lui il était impossible que ce savoir-faire se perde. « Je comprenais son désir de prendre sa retraite, mais je voulais absolument réussir à trouver le moyen qu'il transmettre son savoir », explique Jean-Marie Gilles.
Le maire va donc trouver la possibilité de mettre en place, avec la CCI du Gard, un dispositif de la transmission du savoir-faire. Concrètement, un contrat est passé avec Claude Monleau qui va, pendant six mois, assurer cette transmission et ses secrets de fabrication pour les andouillettes et les saucissons. Une belle aventure pour les trois parties.
L'ancien boucher a trouvé un jeune passionné qui apprend, notamment les secrets du fumage au bois de hêtre. « Il a les épaules le petit. Il est bon c'est certain ». Le jeune boucher est dans des locaux modernes, conçus pour son métier, avec du matériel transmis par l'ancien boucher. Le maire a retrouvé une boucherie pour sa commune. Les premiers clients ont pu venir depuis quelques jours et les premiers retours sont plutôt bons.
« On travaille bien ensemble. En plus, j'adore les concours. Je vais participer au prochain Gard Gourmand et dès que possible je présenterais mes produits au Saucicréor. Je voudrais aussi participer au Concours général agricole lors du salon international de l'agriculture de Paris », poursuit le jeune boucher. Au vu de sa motivation, de nouvelles médailles pourraient bien orner les murs de la boucherie Vallabréguante dans les prochaines années.
Franck Chevallier