GARD "Solidarité paysans 30" accompagne les agriculteurs en difficulté
Depuis plus de 20 ans, l'association Solidarité paysans 30 accompagne et défend gratuitement les agriculteurs en difficulté. Des difficultés qui justement ont tendance à s'élargir, alors que le début d'année a été marqué par la colère de toute la profession.
En ce début d'année 2024, agriculteurs et agricultrices se sont mobilisés partout en France, dénonçant les conditions compliquées de leur métier. Dans le Gard, comme dans plusieurs départements français, est implanté le réseau "Solidarité paysans". Et justement, cette association accompagne et défend tous les paysans en difficulté qui en font la demande, ainsi que leur famille. Créée en 2002 dans le Gard et subventionnée par le Conseil départemental, "Solidarité paysans 30" compte aujourd'hui deux salariés et une quinzaine de bénévoles issus du monde rural, qui prêtent l'oreille et conseillent les agriculteurs confrontés à des situations complexes.
"En moyenne, on accompagne entre 60 et 70 familles par an. En 2023, c'était 60. Depuis janvier 2024, on en a déjà 35. C'est plus que d'habitude même si ce ne sont pas que de nouvelles personnes dans les chiffres", rapporte Jocelyne Fort, coprésidente de l'association gardoise qui a tenu son assemblée générale ce mardi, à Sanilhac-Sagriès. Cette tendance à la hausse fait écho à un contexte global marqué par les crises viticoles et de la filière biologique, après des crises successives (gel de 2021, sécheresse de 2022, crise sanitaire...). Au sein de l'association, on observe au fil des années un élargissement du spectre des difficultés et "une dimension sociale liée au risque suicidaire de plus en plus prégnante".
Cessation de paiement, menaces de saisies, divorce, catastrophes naturelles...
Sortir les agriculteurs et agricultrices de l'isolement, de la précarisation et trouver des solutions pour qu'ils s'en sortent, c'est tout l'enjeu de l'accompagnement de "Solidarité paysans 30". Cessation de paiement, menaces de saisies, divorce, catastrophes naturelles, baisse du chiffre d'affaires sont autant de problèmes rencontrés par des exploitants, auxquels l'association tente de trouver des issues. Ce qui ressort le plus en 2023, ce sont les difficultés liées à la gestion administrative qui représentent 28 % des accompagnements dispensés par l'association. Viennent ensuite les problèmes juridiques (18 %), la conjoncture économique (13 %), les problèmes de santé (10 %)... Parfois, les exploitants rencontrent plusieurs ennuis en même temps et l'association peut faire appel à des travailleurs sociaux au besoin.
"Quand on débute un accompagnement, on se rend toujours en binôme sur la ferme. On vient toujours suite à l'appel d'un paysan. L'objectif, c'est qu'il parle, qu'il dise des choses qu'il ne livrerait pas à une institution. On étudie tous ses soucis", détaille Jocelyne Fort. Elle poursuit : "On décide ensemble de l'orientation à prendre. On peut aller sur une procédure à l'amiable, une conciliation, un redressement judiciaire ou jusqu'à une liquidation. On accompagne toujours le paysan au tribunal, pour ne pas qu'il se retrouve seul. On intervient auprès du juge. Mais notre objectif premier, c'est bien sûr de maintenir les paysans." Sur les 60 personnes accompagnées en 2023, plus des deux tiers ont pu poursuivre leur activité.
La viticulture au cœur des enjeux pour les années à venir
En 2023, 23 % des productions aidées par l'association étaient viticoles, 20 % de la filière équine et 17 % de maraichage et cultures légumières. Mais globalement, tous les secteurs sont représentés. Les proportions de personnes isolées et de couples accompagnés sont relativement comparables aussi. À l'origine de la création du réseau "Solidarité paysans", il y avait la nécessité de briser le silence et la non-reconnaissance d'une profession. Aujourd'hui, d'autres enjeux se dressent : "Il y a des mesures administratives qui sont de plus en plus lourdes et dématérialisées", constate Annie Lardet, l'autre coprésidente de "Solidarité paysans 30".
"Mais le gros souci sur 2024-2025, c'est la vigne, rebondit Jocelyne Fort. Aujourd'hui, la production baisse à cause du climat, il y a beaucoup de pertes. Se pose un souci de mévente et la question de ce qu'il faut mettre comme cultures après la vigne. Ce n'est pas évident comme réflexion, surtout quand on est issu de trois générations d'agriculteurs. Le but est qu'ils rebondissent vers autre chose."
Des échanges avec les agriculteurs de l'Uzège
Ce mardi 5 mars, l'association "Solidarité paysans 30" a organisé son assemblée générale à Sanilhac-Sagriès, suivie d'une rencontre avec des paysans de l'Uzège. Parmi les agriculteurs qui ont témoigné, se trouve Thomas Bouët, qui est installé depuis 4 ans et a repris la ferme de ses parents sur le village. Il dispose entre autres de 3 hectares de vergers, 3,5 hectares de vignes et des céréales. Il n'a pas été accompagné par l'association mais rencontre lui aussi des difficultés, notamment d'ordre climatique. Le forage que ses parents ont longtemps utilisé sans souci pour le maraichage, se tarit désormais entre août et septembre. "Chaque été, je perds des fraisiers que je replante à l'automne. Mais je ne multiplie par le maraichage pour l'instant", indique-t-il. Il a sur l'exploitation un "verger conservatoire" où il mène des expérimentations pour déterminer quelles cultures seront les plus résilientes demain. Thomas Bouët fait aussi partie du groupe d'agricultures uzégeois qui a lancé l'association J'enracine en 2023, avec pour objectif d’acquérir et de préserver des terres agricoles et naturelles, pour des agriculteurs qui s’installent, dans un territoire où la pression foncière est forte.
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