FAIT DU SOIR Handicap et parachutisme : quinze volontaires ont fait le grand saut
En novembre 2021, le nageur paralympique, Théo Curin, a réalisé l'exploit de traverser à la nage en 11 jours le lac Titicaca, entre le Pérou et la Bolivie. Une traversée incroyable, alors que ce Français de 22 ans est amputé des quatre membres et a tracté un radeau de plus de 400 kg.
Son handicap ne le freine pas quand il s'agit de relever des défis. Il s'est frotté à un autre élément ce mercredi : l'air. Plus précisément, un saut de 4 000m en parachute à l'aérodrome de Pujaut. Il faisait partie des 15 personnes en situation de handicap qui se sont élancées dans le vide, en tandem. Hémiplégie, paraplégie, amputation, myopathie… Ces personnes affichaient des pathologies diverses mais la capacité à sauter dépend non du handicap seul mais aussi de différents facteurs (poids, tenue de tête, prothèses éventuelles, maladie, etc.) Avec le feu vert du médecin de la Fédération de parachutisme et le directeur technique de la zone de saut et un certificat médical, ces quelques courageux mais aussi chanceux venus de toute la France ont eu le privilège de sauter en parachute.
"En France, on est quasiment le seul pays à faire sauter aussi les personnes atteintes d'IMC (infirmité motrice cérébrale)", se réjouit Michel Guiavarch, ancien médecin de la Fédération française de parachute. Si cette journée nommée "Handi'Boogie" a pu avoir lieu, c'est grâce à l'association Handi'skydive, créée en 2018, par Maxime Granier, IMC et étudiant en dernière année de STAPS. Lui-même a des difficultés à coordonner ses membres et se déplace en fauteuil roulant. Il n'empêche que depuis l'enfance, il pratique de nombreux sports (judo, équitation, attelage, plongée, ski autonome, pilotage d’avions de tourisme, danse, escalade sur mur...). À ses 15 ans, on lui offre un baptême en parachute alors qu'il ne pensait pas en être capable.
Faire découvrir une discipline nonobstant le handicap
Aujourd'hui, Maxime Granier est double champion de France handifly et a aussi remporté deux fois l'International handifly challenge en 2018 et 2019. Si lui s'accomplit dans ce sport, il veut prouver aux autres personnes atteintes de handicap qu'elles peuvent également s'y essayer et y trouver du plaisir. L'objectif de son association est de permettre à des personnes en situation de handicap moteur de découvrir cette discipline qui ne leur semble peut-être pas au prime abord accessible, et d’en faciliter la pratique.
Ce mercredi, chaque personne a pu faire un saut en tandem avec un pilote qualifié. La montée en avion dure environ 15 à 20 minutes pour atteindre les 4 000 mètres d'altitude. La porte s’ouvre. Après 50 secondes de chute libre, le parachute s’ouvre pour une descente calme de 5-6 minutes qui permet d’admirer le paysage. Au sol, une équipe attend pour assister l’atterrissage.
"On ressent une sensation de liberté. Surtout quand on se retrouve sous la voile, seuls au monde, sans un bruit. À force, cela devient une passion car c'est là où se sent bien", relate Hayri, venu de Toulouse. Cet ancien de l'Armée, aujourd'hui en fauteuil, n'en est pas à son premier saut. Il compte parmi 11 compétiteurs handi, en stage intensif toute cette semaine à l'aérodrome de Pujaut, berceau-même du parachutisme. En parallèle de cette journée découverte, le groupe prépare la première compétition internationale d'handifly en soufflerie (chute libre indoor) qui se déroulera les 19 et 20 mai, à Marseille.
Le projet Handifly a été lancé en 2013 et consiste à ouvrir le parachutisme et la soufflerie aux personnes en situation de handicap. La discipline a été introduite au championnat de France en 2015 avec des valides. Un nouveau projet européen consiste à organiser dans toute l'Europe des vols de découverte gratuits en soufflerie. Dores et déjà 6 000 vols ont été effectués sur l'objectif de 9 000 en deux ans.
Marie Meunier