ROQUEMAURE "Ils veulent m’expulser de mon propre terrain !"
Entre Christian Delmas et la municipalité de Roquemaure, c’est une affaire qui dure.
Sept ans que la commune et le retraité de 69 ans, qui vit sur son terrain situé en bordure de la route de Nîmes sont en conflit, et ça ne semble pas prêt de s’arranger.
« Ici, on accueille les familles qui sont à la rue »
En cause : le fait que le sexagénaire habite sur ce terrain depuis 2007, et qu’il y héberge temporairement dans des mobil-homes des personnes dans la précarité avec son association Refuge Chrétien de Plein Air.
« Actuellement, il y a Jérôme, et des femmes qui viennent la nuit pour dormir dans leur voiture, explique Christian Delmas. Elles viennent ici pour ne pas être emmerdées. » L’homme affirme également avoir hébergé pendant quatre ans une famille de Roumains « envoyés par la Croix-Rouge d’Orange », mais aussi un étudiant sans-abri pendant quelques semaines. « Ici, on accueille les familles qui sont à la rue », résume celui qui préside l’association. Il faut dire qu’il s’est lui-même retrouvé dans la précarité quand, après un cancer, il a dû quitter le camping où il vivait car il n’avait plus les moyens d’y rester, pour se retrouver sur son seul bien, ce terrain entre la route et les vignes. C’est pour aider les personnes qui se retrouvent dans cette situation que la Refuge Chrétien de Plain Air est créé il y a une dizaine d’années « par deux femmes à qui j’avais fait un bail de 2 francs, se souvient Christian Delmas. Elles se sont retirées quand il y a eu le conflit. »
Par « le conflit », Christian Delmas entend le référé que la mairie de Roquemaure dépose contre lui au printemps 2009 pour violation du Plan d’occupation des sols. « On nous a enlevé les caravanes le 15 juillet 2009 », raconte le sexagénaire. Saisies, les caravanes ne lui ont jamais été rendues. S’ensuit une bataille judiciaire qui n’est toujours pas finie entre Christian Delmas et la commune de Roquemaure, qui a changé deux fois de maire depuis.
« Ils vivent comme des sauvages »
« C’est en attente aujourd’hui, affirme le maire de Roquemaure André Heughe. Il essaie de gagner du temps. » Chaque camp se renvoie la responsabilité : « ils essaient de m’expulser de mon propre terrain, alors qu’on est dans la loi ! », dénonce le propriétaire des lieux, qui voit dans la saisie de ses caravanes « un délit, une violation de propriété privée » sur un terrain que la mairie, selon lui, voudrait récupérer gratuitement, aidée par une voisine qui contribuerait à le persécuter. Le maire s’inscrit en faux : « on s’en fout de son terrain ! Il n’est pas constructible, on ne peut rien y faire. » Et André Heughe de souligner le fait qu’« il n’y a pas d’assainissement là bas, ils vivent comme des sauvages. »
Pour l’édile, ce terrain est « un mauvais exemple pour Roquemaure » et Christian Delmas « quelqu’un qui croit qu’il a tous les droits, mais on n’a pas le droit de faire ce qu’on veut sur un terrain avec des sans papiers. Et on a des doutes, on se demande s’il ne serait pas un marchand de sommeil. » De son côté Christian Delmas affirme que « personne n'a payé jusqu'à maintenant. »
En attendant l’épilogue de cette bataille qui dure depuis sept ans, Christian Delmas ne compte rien lâcher : « j’ai dit aux gendarmes qu’il n’y aura qu’une chose qui pourra m’arrêter, c’est une balle dans la tête. Je ne lâcherai que quand j’aurais tout récupéré. » Et il compte bien accueillir bientôt sur son terrain « un couple de quinquagénaires Ukrainiens qui font la manche à Orange. »
Thierry ALLARD