Publié il y a 1 an - Mise à jour le 15.05.2023 - François Desmeures - 3 min  - vu 1614 fois

ROCHEGUDE Envisagée, la retenue d'eau de 600 000 m3 fédère déjà contre elle

La Cèze, à Saint-Ambroix, le 6 février dernier 

- (photo François Desmeures)

Un collectif s'est monté contre le projet de bassine de Rochegude, vieux dossier de la fin des années 2000, qui réémerge sous le coup de la sécheresse.

Le collectif Eaux à gué réunit Attac, la Confédération paysanne, le comité nîmois de soutien aux soulèvements de la terre, Terre de liens Languedoc-Roussillon, Terres vivantes en Cévennes, etc.  • (photo François Desmeures)

Un collectif réunissant des opposants alésiens, l'association Attac, Terres vivantes en Cévennes ou le collectif nîmois des Soulèvements de la terre s'est dit extrêmement vigilant sur le sujet, tout en soulignant la différence avec les méga-bassines de Sainte-Soline. Mais la proximité du projet avec la station de pompage de Rochegude fait craindre un ajustement par du pompage dans la nappe, en cas de besoin.

Membre du mouvement politique Génération.s, c'est Sébastien Espagne qui fut le premier à soulever un sujet qui se murmurait dans les réunions agricoles départementales, soit le projet d'une bassine d'une capacité d'environ 600 000 m3 pour le compte de l'association syndicale autorisée (ASA) Irrigation de la région de Saint-Jean-de-Maruéjols. Une ASA qui irrigue une centaine d'agriculteurs à proximité de la Cèze, premier bassin dont l'aval est d'ores et déjà en situation de crise depuis le mois d'avril, interdisant tout arrosage, y compris pour les agriculteurs. Globalement, en temps normal, les assecs de la Cèze sont plus importants que ceux du Gardon, ou même ceux du Vidourle. Aujourd'hui, ils sont aussi plus précoces.

Quelques semaines après les affrontements de Sainte-Soline, le sujet de l'eau est évidemment incandescent, bien que la retenue d'eau ne devrait être remplie que par les crues de la Cèze. La deuxième année de sécheresse a aussi de quoi hystériser les craintes de tension en eau que la région connaît depuis longtemps. "Ce qui est annoncé est impressionnant, exprime en écho Jacqueline Balvet, de l'association Attac, membre du collectif Eaux à gué qui s'est créé en vigilance au projet. On parle de 15 hectares, 600 000 m3 d'eau retenue. On a toujours considéré que l'eau était une ressource inépuisable. Il faut qu'on puisse discuter du projet pour voir de quoi il relève : qui va être desservi par cette réserve ? Quels types de culture ?" Pour certains opposants présents, notamment agriculteurs membres de la Confédération paysanne et de Terres vivantes en Cévennes, le lien avec la coopérative de semences céréalières Bollène-Barjac ne fait guère de doutes. 

"Quelles conséquences pour l'aval ? Et quel coût en matière d'argent public ?" Alors que, selon les opposants, l'Agence de l'eau financerait le projet à hauteur de 70% et la Région de 10%. Réclamant un changement des pratiques plutôt qu'une fuite en avant dans la gestion de l'eau, le collectif préfèrerait voir des aides données pour faire évoluer l'agriculture. 

Un pompage dans la nappe inenvisageable pour la DDTM

"Le projet est dans le contrat d'intercommunalité du 17 décembre 2021, est venu confirmer Michel Dehoux, membre de l'association Transition énergétique en Cèze Cévennes, qui sert d'assistant à la maîtrise d'ouvrage de l'intercommunalité de Cèze Cévennes sur les questions environnementales. Les terrains ont été délimités à la Safer, à côté de la station de pompage de Rochegude." Un détail qui fait craindre aux opposants que les années où la pluviométrie serait insuffisante, la bassine pourrait être remplie avec l'eau de la nappe.

Interrogé en marge d'un autre rendez-vous il y a une dizaine de jours, un responsable de la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) - qui serait appelé à traiter le dossier du projet si celui-ci allait de l'avant - a répondu à Objectif Gard qu'aucun dossier n'était pour l'instant parvenu à ses services. Et, surtout, que dans nos régions, il était inenvisageable d'accepter une bassine qui serait remplie avec l'eau de la nappe phréatique.  

"Si on pouvait trouver un moyen d'éviter cette construction, ce serait mieux."

Michel Dehoux, de l'association Transition énergétique en Cèze Cévennes

Même conseiller de la force publique, Michel Dehoux lâche l'avis de son association, telle qu'il compte l'exprimer auprès de l'intercommunalité. "Si on pouvait trouver un moyen d'éviter cette construction, ce serait mieux." Tout en affirmant qu'il existe des moyens de limiter l'évaporation d'une bassine à ciel ouvert grâce à des panneaux photovoltaïques flottants ou des haies qui viennent freiner le vent. 

Enfin, côté ABCèze, syndicat gestionnaire du cours d'eau, on insiste sur le fait que, pour l'instant, il n'existe pas de projet en tant que tel et que le syndicat sera, de toute façon, membre du comité de pilotage et aura son mot à dire. "Mais on est loin d'avoir toutes les données pour donner un avis. On ne sait pas, notamment, quand se feraient les prélèvements."

Sur la ventilation des financements, le syndicat souligne aussi que les pourcentages avancés donnent une idée de ce à quoi pourrait éventuellement prétendre le projet, selon la loi, mais sans aucune automaticité. Quant au volume de 600 000 m3, il correspondrait à un calcul mathématique entre la surface de terrains disponibles et la hauteur envisagée de la bassine. Le chiffre donné n'est donc, selon ABCèze, qu'une estimation. 

Parmi les solutions réclamées par certains agriculteurs, un relèvement du niveau du barrage de Sénéchas... qui est bien loin d'être rempli actuellement, faute de pluies • (photo DR)

François Desmeures

A la une

Voir Plus

En direct

Voir Plus

Studio