NÎMES EN FERIA Malgré le vent Lalo triomphe des éléments
Lot de toros de Jandilla et Vegahermosa pour l’alternative de Lalo de Maria (oreille et oreille) avec Sébastien Castella (silence et salut) et Jose Maria Manzanares (oreille et silence).
C’est le grand jour. Nous ne sommes pas un vendredi 13 mai mais nous sommes un vendredi 13 tout de même et cela plaît à Lalo de Maria. Petit rappel, le maestro a perdu son papa un vendredi 13 mai (2016) et il s’était dit qu’il prendrait l’alternative à la même date.
Pas de feria le vendredi 13 mai 2023 mais ce créneau de septembre 2024 a eu l’intérêt de Simon Casas, l’empresa des arènes. Il faut dire que le maître des arènes est très proche du jeune du jour, il l’a vu grandir et l’a suivi depuis sa naissance. Encore plus depuis qu’il a sauté le pas et qu’il est devenu torero.
Lalo est un peu Nîmois, c’est ici que ses souvenirs taurins vibrent, c’est ici qu’il a voulu être sacré. Lalo aurait aimé que les tendidos soient pleinement derrière lui mais il demeurait le doute. Son costume de lumière, arborant étoiles et symboles, a été fait par Jonathan Veyrunes. « Tout se passera bien, j’en suis sûr » disait le futur matador de toros il y a encore quelques jours.
Le vent souffle fort au paseo mais le public soutient parfaitement le futur matador. Malgré le froid ambiant, les tendidos sont là et Lalo le sait. Avec Ondulado, il entre dans la cour des grands. Après une cérémonie émouvante, le jeune s’avance et brinde son premier toro à sa mère, Marie Sara. Plein de larmes, Lalo revient en piste affronter ce Vegahermosa dont la troisième corne, le vent, aura fait frémir spectateurs et professionnels. Une faena compliquée, sous le vent, les rafales empêchant toute quiétude. Lalo continue et obtient, après une épée lègèrement tombée, l’oreille des gradins. Gageons que ce geste lui a fait chaud au cœur.
Sur le dernier de la course, son vrai premier toro, Lalo se disait prêt à toréer sous les lumières halogènes. Un souvenir d’enfance. Quand il venait aux arènes et assistait à des triomphes nocturnes, s’imaginait-il en secret vivre les mêmes émotions quelques années plus tard ? Il coupera une nouvelle oreille qui lui permettra de sortir en triomphe des arènes. Après une attaque tonitruante et de belle facture, les genoux en terre et la muleta sous le mufle, le maestro reprend une lidia plus classique mais se fait désarmer (à trois reprise capote compris). Lalo montre qu’il ne lâche rien, les gradins le voient et une épée concluante lui permet de saluer dignement son public avec un large sourire et de la buée dans les yeux.
À 41 ans passés, le Biterrois Sébastien Castella en a vu défiler… Il a sacré de nombreux matadors de toros qui sont encore dans le circuit mais pour d’autres, l’histoire taurine est terminée. Avec Lalo de Maria, c’est autre chose. Il l’a accueilli à la maison, il le connaît et les deux toreros s’apprécient. Castella, après 24 temporadas (sans sa courte retraite) est au sommet de son art.
Pourtant, Sébastien Castella écoutera le silence à l’issue de sa première prestation. Chagriné par quelque chose, le biterrois met du temps à se trouver mais quand il prend la faena et qu’il se met sous le palco aux planches, tout le monde sentait que les trophées allaient pleuvoir. Rappelons tout de même que son premier toro a été changé pour boiterie. Face à ce cornu, le vent gâchera tout essai du piéton. Hélas le duo ne tiendra pas, le toro s’éteindra.
Il accueille son second toro avec plus d’envie et de panache. Pourtant, son Jandilla n’est pas beaucoup plus coopérateur que son premier mais, encore une fois, Castella comme Manzanares ont l’étoffe des grands et sont de vrais professionnels. Le Français ne renonce pas et essaie d’entrer dans le terrain d’un toro violent par à-coup et sans transmission. Dommage, on le reverra avec plaisir demain matin pour son quatrième paseo nîmois cette saison.
À Nîmes, les toros de Jandilla viennent depuis près de 50 ans. Le père Manzanares était au cartel lors de leur présentation en 1975 dans l’amphithéâtre. Jose Maria Manzanares n’est pas par hasard au cœur de ce cartel de luxe.
Si Lalo de Maria est proche de Castella, il l’est tout autant de Manzanares qui fut le second maestro à le faire entrer chez lui alors qu’il n’était qu’un jeune torero curieux. Lalo est matador de toros, plus de retenue. Manzanares coupera une belle oreille face à son premier qu’il tua d’un recibir qui avait manqué aux gradins. On a enfin retrouvé le Jose Maria Manzanares d’il y a quelques années. Un toreo pur et efficace, une gestuelle relâchée, douce, rondelette, suave. Un plaisir des yeux. Sur la courte distance, l’Alicantino montre de belles choses.
Le plus violent de la tarde sera sans doute le cinquième. Manzanares encore un toro en-deçà de ce qu’espèrent toreros et spectateurs un jour d’alternative et d’ouverture de feria. Si à cela vous ajoutez les rafales de vent à 80Km/h… Imaginez ! Impossible de toréer correctement, même avec l’envie dont a fait preuve Manzanares. C’est rageant de savoir que le bonhomme en a sous le capot et de ne pas voir ce pourquoi il était venu : toréer pour triompher une nouvelle fois ici. Pas de chance, la faute à personne sauf peut-être Éole… Silence.