ALÈS La nouvelle médiathèque souffle la première bougie d'une vie à débit réduit
Le 29 février dernier, après plus d’un an de travaux, la médiathèque Alphonse Daudet était inaugurée. Plus spacieuse, plus moderne et plus conviviale, elle n’a hélas pas encore pu livrer son plein potentiel en raison de la pandémie. Parce qu’ils en sont les grands artisans et la connaissent mieux que personne, Lucie Di Natale et Hervé Rédares nous la font (re)découvrir.
15 janvier 2000. La médiathèque Alphonse-Daudet ouvre ses portes à plus de 5 000 Alésiens venus assister à l’inauguration. Un an plus tard, le succès est fulgurant et se mesure au nombre de visites : 350 000 ! Mais les années passent, le monde change et les pratiques culturelles évoluent. La fréquentation est en baisse lorsque l’agglomération d’Alès entreprend une rénovation fin 2018.
Action n°1 des États Généraux du cœur de ville, la réhabilitation de la médiathèque, confiée à l’architecte cévenol Hervé Rédares, va durer plus d’un an. La très attendue réouverture est actée le 29 février 2020 et près de 9000 personnes prennent part à cette journée portes ouvertes où un sentiment prédomine : le rendu est bluffant !
3500 m², 1,8 millions d'euros et 14 mois de travail
Mais quinze jours plus tard, parce que le coronavirus gagne dangereusement du terrain, les Français sont confinés et rentrent dans une nouvelle ère qui, un an après, n’a toujours pas connu d’épilogue. Fermée dans un premier temps, la médiathèque a rouvert dans des dispositions sanitaires strictes ne lui permettant pas d’exploiter son plein potentiel. « C’est un peu frustrant », reconnaît Hervé Rédares, créateur de l’atelier Inextenso, qui a travaillé d’arrache-pied pendant 14 mois sur le dossier.
« On nous avait demandé de livrer en un an mais c’était pratiquement impossible », prévient l’architecte, habitué des marchés publics. « Le challenge c’était de rendre le lieu moins vieillot en créant une nouvelle identité beaucoup plus d’actualité. Ce n’était pas évident car on était très contraints par la structure initiale du bâtiment qui était un centre commercial jusqu’à la fin du XXe siècle », se souvient Hervé Rédares.
Disposant d’une enveloppe de 1,8 millions d’euros pour repenser intégralement une surface de plus de 3500 m², l’artisan a travaillé pour la première fois de sa longue carrière avec l’appui d’une architecte d’intérieur : Lucie Di Natale. « On a livré un rendu qualitatif à un prix défiant toute concurrence », savoure l’architecte, approuvant par ailleurs la complémentarité du travail de l’architecte d’intérieur qui, « par son souci du détail, valorise mon travail initial basé sur les gros volumes. »
Confort et convivialité au cœur de la démarche
« Je suis le chaînon manquant entre l’architecte et le décorateur d’intérieur », se marre Lucie Di Natale. Installée près de Vézénobres où elle a donné vie à l’atelier Di Natale en 2016, la dernière nommée a un temps habité à Alès, « à deux pas de la médiathèque », qu’elle connaissait bien en tant qu’utilisatrice. « Je voyais déjà ce qu’on pouvait espérer en termes d’espaces et ce dont les usagers avaient besoin », confie celle qui rêvait de travailler sur un tel projet.
« On a fait un gros travail sur les postures en se demandant comment les gens avaient envie de s’installer pour lire. Il y en a pour tous les goûts, du coin cosy avec des canapés, au coin ados avec des poufs, mais aussi des hamacs et des fauteuils », énumère Lucie Di Natale. Le tandem a mis le confort et la convivialité « au cœur de la réflexion » pour livrer un espace aussi moderne qu’épuré, au sein duquel la ludothèque figure en place centrale.
« Il y a aussi un coin café-presse à l’entrée qui n’est pas encore utilisé comme il pourrait l’être », regrette l’architecte d’intérieur, qui a « beaucoup joué avec les couleurs » pour créer des perspectives et des espaces distincts. « Quand on se trouve dans l'espace littérature rose, notre œil est attiré par l'espace art bleu/vert », explique Lucie Di Natale. « On a aussi travaillé sur la notion de boîtes pour créer des ambiances très différentes », complète Hervé Rédares qui, pour l’espace dédié aux enfants, a façonné « un système d’emporte-pièces comme à Tetris avec un travail d’auto-correction sur le plan acoustique. »
Partisan d’une architecture écologique et durable, respectueuse de l’homme et de son environnement, ce dernier se dit « très impliqué dans l’utilisation de matériaux biosourcés » qu’il a tenté d’optimiser autant de fois qu’il en a eu l’occasion au cours du chantier de la médiathèque Daudet. Le duo partage toutefois une « petite amertume », celle de n’avoir pu finaliser la façade de la médiathèque sur laquelle il avait « beaucoup travaillé » et qui a « énormément orienté les choix pour le design intérieur. »
Malgré tout, le pari initial semble réussi dans la mesure où « les anciens utilisateurs qui rentrent dans la nouvelle médiathèque ont l’impression de rentrer dans un nouveau lieu et l'apprécient », jure Hervé Rédares. Les élus locaux, Christophe Rivenq, président d’Alès Agglomération, en tête, n’ont pas boudé leur plaisir au moment de la livraison de ce chantier colossal qui a fait de la rue Edgard-Quinet un chantier à ciel ouvert pendant plus d’un an.
Ces derniers continuent de l’embellir par la pose d’un mobilier urbain en forme de livres au mois de décembre dernier (lire ici), la rénovation du parvis de la médiathèque et l’aménagement d’un joli giratoire à proximité. Plus moderne, plus spacieuse, plus lumineuse, plus conviviale, la médiathèque Alphonse-Daudet d’Alès sera donc plus accessible. Reste à savoir si elle sera désormais plus fréquentée. Un questionnement dont la réponse ne sera connue que lorsque la pandémie ne fera plus partie de nos vies...
Corentin Migoule
Atelier Di Natale, 1 rue du Bas plan à Vézénobres. Plus d'informations au 06 79 09 15 39. Atelier Inextenso, 584, chemin sous Saint-Etienne à Alès. Plus d'informations au 04 66 78 89 40.