LUSSAN Père de "Max et Lili", dessinateur de presse... Retour sur les 40 ans de carrière de Serge Bloch
"La liberté est dans le trait." Parole de dessinateur. Depuis maintenant quarante ans, Serge Bloch illustre titres de presse, livres ou encore dessins animés. Sous sa plume sont nés les fameux personnages de la saga jeunesse "Max et Lili". Malgré leurs trente ans et 126 livres édités, ces deux enfants n'ont pas pris une ride. Nous nous sommes rendus à Lussan, dans l'antre de leur créateur.
Lunettes rondes posées sur le nez, Serge Bloch planche sur ses prochains projets dans son atelier aux murs blancs à l'étage de sa maison à Lussan. En fond sonore défile sa playlist Spotify. Les styles musicaux sont aussi variés que sa carrière.
Serge Bloch a grandi à Colmar, en Alsace. Un peu comme tous les illustrateurs, il s'amusait à gribouiller ses cahiers pendant les cours à l'école. Ce qui agaçait ses professeurs, mais ne l'empêchait pas d'écouter et de ramener des bonnes notes. Il ne s'imaginait pas à l'époque qu'il pouvait en faire un métier. Passé 18 ans, il a fait ses études à l'École supérieure des arts décoratifs de Strasbourg.
Des collaborations avec The Washington Post, The Wall Street Journal, The New York Times...
De là est née une carrière aussi riche que variée. Pendant longtemps, Serge Bloch a été directeur artistique chez Bayard jeunesse. Il est l'auteur-dessinateur de la bande dessinée SamSam, du personnage éponyme originairement présent dans le mensuel pour enfant Pomme d'Api. Il a illustré la série "Max et Lili" mise en texte par Dominique de Saint Mars. Il a également travaillé au côté de l'auteure jeunesse Susie Morgenstern.
Si Serge Bloch s'est fait un nom dans l'édition jeunesse, c'est loin d'être la seule corde à son arc. "Je ne veux pas me limiter. Quand quelque chose fonctionne bien, j'en profite pour ouvrir une autre porte", lance-t-il.
Au fil des années, il a collaboré avec de nombreux titres de presse comme La Croix, Télérama... Mais aussi aux États-Unis - où il a vécu quatre ans - notamment The Washington Post, The Wall Street Journal, The New York Times, The Boston Globe, Los Angeles Times... Serge Bloch glisse toujours une dimension comique dans ses dessins: "Quand les gens sourient, c'est gagné." Il enchaîne les rendus grâce à son style rapide, avec les traits fins et minimalistes.
"Ça ne m'intéresse pas de dessiner bien, ce que je veux c'est que le dessin soit vivant."
"Lorsque j'étais à Santiago pour donner une conférence, une dame m'avait introduit en disant : "C'est interessant parce que vous dessinez mal et vous arrivez quand même à raconter une histoire"", raconte l'illustrateur. Loin de s'en offenser, il s'était amusé de cette présentation et est bien sûr d'une chose : "Ça ne m'intéresse pas de dessiner bien, ce que je veux c'est que le dessin soit vivant." Un message qu'il veut adresser à tous les enfants. Même à ceux qui ne colorient hors des lignes ou préfèrent le soleil vert et l'herbe bleue.
Non, Serge Bloch veut juste "faire réfléchir et amuser sans provoquer". De confession juive, il montre une certaine pudeur sur les questions religieuses et ethniques. Le drame de Charlie Hebdo en tête, il livre : "La limite peut être assez vite franchie. On peut faire de l'humour sans fâcher personne." Aujourd'hui, il dessine pour la revue trimestrielle Zadig, croquant les personnalités de l'interview centrale. Il les esquisse sous les traits de petits oiseaux, comme pour prendre de la distance. Même le président de la République a eu le droit à son petit lifting anthromorphique.
En artiste très libre, Serge Bloch ne s'arrête pas au carré blanc du dessin. En 2017, il a illustré la carte de voeu du ministère de la Culture. Le dessinateur donne vie à ses personnages grâce à l'animation ou aux gifs. De courts films ont été tirés des ouvrages bibliques illustrés "Dessine-moi la Bible" et "Jésus, l'histoire d'une Parole" qu'il a fait avec Frédéric Boyer. Il a aussi dessiné pour une ligne de vêtements Petit Bateau, apposé ses coups de crayon sur de la vaisselle... Le Lussanais teste en ce moment la superposition de cubes, donnant lieu à des installations parfois monumentales.
Après avoir exposé un peu partout dans le monde, Serge Bloch prépare maintenant deux expositions. Une rétrospective au TNP de Villeurbanne (69) et une autre à la médiathèque d'Uzès très prochainement. En attendant, il poursuit son travail à l'atelier et profite de sa famille d'artiste. Sa femme peint, ses deux fils sont sculpteur et peintre : "C'est une pathologie familiale." À laquelle nul n'a trouvé de remède...
Marie Meunier
Découvrez les créations de Serge Bloch sur son site internet : www.sergebloch.com/