ÉLEVAGE La fièvre catarrhale ovine commence à faire des ravages dans les troupeaux de brebis
Le syndicat agricole Modef alertait, ce mardi après-midi, sur la progression fulgurante de la fièvre catarrhale ovine dans les troupeaux du département, dénonçant au passage le mutisme de l'État. Au même moment, la préfecture émettait un arrêté concernant la maladie hémorragique épizootique. Mais toujours rien sur la fièvre catarrhale. D'après le Modef, entre 60 et 80 éleveurs seraient touchés, principalement dans le sud des Cévennes. Pour l'instant, la lutte est à la seule charge de l'éleveur, tout en assistant au décès de ses brebis.
Il y en aurait 600 foyers en France à cette heure. "Mais on ne possède pas de chiffre précis, contrairement à la MHE" (maladie hémorragique épizootique, lire encadré), explique Sophie Bezeau, directrice du syndicat agricole Modef (mouvement de défense des exploitants familiaux). Représentant gardois du syndicat, éleveur à Corbès et élu à la chambre d'agriculture, Frédéric Mazer, a déjà recensé 150 foyers en Aveyron. "La maladie touche aussi la Lozère et on pense que la situation est sous-estimée dans le Gard."
Frédéric Mazer ne s'attendait pas à un tel retour d'estive. "On était tous dans l'ignorance de ce qui nous arrivait, témoigne-t-il, même si on commençait à en entendre parler dans l'Aveyron." Il assiste alors à l'affaiblissement de quelques individus dans ce troupeau de 300 bêtes, voit la fièvre monter... "Et puis c'est très rapide : c'est la mort en quatre ou cinq jours." Frérdéric Mazer emporte ses bêtes chez le vétérinaire qui les trouve positives au type 8 de la maladie, virus présent dès 2015, "mais qui est toujours en mutation". Sur les 28 brebois positives dans son troupeau, 17 sont déjà mortes. "Si on détecte assez vite la maladie, qu'on les voit changer d'attitude, on peut donner des corticoïdes."
Il existe pourtant un vaccin, efficace une vingtaine de jours après l'injection. "Mais il n'était pas disponible dans la période où on a vu arriver l'épidémie, regrette Frédéric Mazer. C'est pendant ces deux semaines-là qu'il aurait fallu qu'on vaccine." Les doses seraient disponibles en nombre important depuis la fin de la semaine dernière. Mais même vaccinées, les bêtes restent vulnérables vingt jours durant.
"À chaque vétérinaire, un protocole différent"
Frédéric Mazer, éleveur à Corbès
"On n'a aucune nouvelle de la part des services de l'État", poursuit Frédéric Mazer. "On avait interpellé le ministre sur la question au moment du salon de l'élevage, début octobre, renchérit Sophie Bezeau. Il ne connaissait pas de cas en France et on n'a pas de retour depuis." "Et les groupements de défense sanitaire (GDS) sont pris entre deux feux, les excuse Frédéric Mazer : on les assaille mais eux ne peuvent rien nous dire puisqu'ils n'ont rien de la part de l'État." C'est donc à l'éleveur d'assumer seul la lutte, "avec à chaque vétérinaire un protocole différent". Et un vaccin qui coûte 2,50 € par dose, la perte de la brebis qui reste à la charge de l'éleveur, sans compter les "conséquence sur des avortements et des pertes de chaleur", complète Sophie Bezeau.
La maladie ne se transmet pas à l'homme
Les éleveurs rappellent tout de même que la fièvre catarrhale n'est absolument pas transmisible à l'homme, et qu'aucune contre-indication ne vient entacher la consommation de viande d'agneau. Face à ce virus porté par un petit moucheron, le culicoïde, "facilement transportable par le vent", le Modef recommande déjà d'éviter la propagation en voyant "comment circulent les animaux". Fatigué de lutter, Frédéric Mazer souligne l'impact humain de voir mourir ses bêtes. Et l'impact financier, évidemment, dans des exploitations où l'équilibre financier est généralement très fragile. Si des élevages sont touchés dans tout le département, "le quadrilatère principal de contamination se trouve entre Barre-des-Cévennes, Alès, Anduze et Lasalle".
"On demande une réunion de concertation entre la préfecture, la DDTM (direction départementale des territoires et de la mer), la DDPP (direction départementale de protection des populations), les GDS, les services vétérinaires et les syndicats agricoles, espère Frédéric Mazer. On a beaucoup trop la tête dans le guidon en ce moment, beaucoup de travail, et l'impression d'être abandonnés", lâche l'éleveur, qui constate aussi que le sujet intéresse peu la chambre d'agriculture dont il est élu.
Une zone réglementée pour la maladie hémorragique épizootique
La préfecture a émis, ce lundi 23 octobre, un arrêté visant à mettre en place une zone réglementée concernant la maladie hémorragique épizootique des ruminants dans le Gard. "En raison de la progression de la maladie hémorragique épizootique (MHE) présente sur des ruminants du sud-ouest et l’est de la France, le préfet du Gard a décidé par arrêté préfectoral de placer en zone réglementée les communes gardoises situées à moins de 150 km des élevages infectés, le cas le plus proche étant situé à ce jour dans le Tarn." Soit 206 communes à l'ouest du département. Pour la préfecture, les "signes cliniques de cette maladie émergente (...) sont très proches de ceux de la fièvre catarrhale ovine (...) Les symptômes (fièvre, ulcérations du mufle, jetage, boiteries...) se manifestent principalement chez les bovins et les cervidés, très peu chez les ovins et les caprins." La préfecture rappelle que la maladie ne présente aucun danger pour l'homme, mais qu'il n'existe pas encore de vaccin. Des mesures de restriction de mouvement sont prises. "L’envoi d’animaux à l’abattoir reste possible sans dépistage préalable". La maladie progressant rapidement, la zone concernée est susceptible d'évolutions.