L'INTERVIEW Philippe Ribot : "Être expérimenté, blindé, permet de franchir des passages plus difficiles"

Philippe Ribot.
- Yannick PonsBien décidé à repartir pour un quatrième mandat à la tête de Saint-Privat-des-Vieux, Philippe Ribot ne cache pas constater "un relâchement des équipes municipales" face aux multiples obstacles rencontrés et à venir pour les mairies. Un œil porté sur le salon des maires du 22 mai prochain, il appelle "le bloc local à parler d’une même voix".
Objectif Gard : Comment définiriez-vous ce mandat, le troisième pour vous en tant que maire de Saint-Privat-des-Vieux, qui approche de son terme ?
Philippe Ribot : Je dirais compliqué, avec des conditions un peu bizarres. J'ai eu la chance d’être élu au premier tour sans liste adverse, donc d'être plus serein. Mais cela a été très compliqué en matière de cohésion d’équipe à cause des masques et distances entre chaque élu au début. Cela a nuit au fonctionnement du mandat sur le coup, mais dans le temps aussi.
Mais cela ne nous a pas empêchés de travailler, les chantiers n’ont pas pris de retard. Être expérimenté, blindé, permet de franchir des passages plus difficiles. Il est important que tout le monde tire dans le même sens et assume ses responsabilités. On va tout faire pour que le prochain mandat démarre dans de meilleures conditions.
Ça a été le mandat le plus dur jusqu’ici et il ne faudrait pas que cela freine certains maires dans une possible nouvelle candidature. J’ai pu remarquer un relâchement des équipes municipales lors de ma tournée des vœux. On subit aussi les évolutions sociétales, les gens sont devenus très exigeants, il y a une perte du sens collectif et un nombrilisme croissant. On est au service de tous, mais on ne peut pas accéder à toutes les demandes. Il faut donc faire preuve de pédagogie et savoir dire non.
Qu'est-ce qui vous pousse à vous représenter en 2026 malgré ces contraintes encore jamais vues et grandissantes ?
J’ai de l’énergie, des projets, une dynamique, même si les auspices financiers vont être compliqués. On a encore du mal à équilibrer le budget 2025. Les marges de manœuvre sont assez faibles, d’autant plus que la majorité des dépenses sont contraintes : assurances, informatique, caisse de retraites des fonctionnaires, inflation, explosion de la fréquentation des garderies et cantines, etc. Les recettes ont, elles, tendance à stagner voire régresser et se dégrader.
La sobriété, c’est le mot à la mode. On mène un gros travail sur l’éclairage public, les schémas de déplacement, l’énergie de bâtiments avec six nouvelles toitures équipées en panneaux photovoltaïques.
Pouvez-vous d'ailleurs nous reparler des travaux de sobriété menés dans les écoles saint-privadiennes ?
Cela a été notre premier projet d'une telle ampleur, avec trois cours d’école, pour trois groupes scolaires. Il a été complexe et coûteux à mettre en œuvre. Mais il permet un changement complet de l’environnement des élèves, professeurs et employés. L’idée est de désimperméabiliser, végétaliser et permettre à l’eau de s’infiltrer au plus près de son point de chute pour créer des îlots de fraicheur. Un audit énergétique d’ingénieur a révélé 17 degrés d’écart entre les espaces goudronnés et ceux végétalisés.
Cela permet aussi de baisser les tensions sociales car cela apaise les esprits. Il reste à faire de même dans les autres espaces publics, en gardant en tête la qualité de déplacement pour les personnes âgées ou à mobilité réduite, les poussettes, etc.
Vous avez également rénové la salle paroissiale...
C'était nécessaire, elle était désaffectée depuis une quarantaine d’années. On en a fait une médiathèque à l’étage et un restaurant scolaire au rez-de-chaussée. Le jardin dit du curé autour est devenu ouvert à la population pour des spectacles et expositions, ce qui permet de centraliser le cœur de village.
Côté sport, qu'a mis en place la mairie ces dernières années ?
Je crois beaucoup aux valeurs de l’activité physique et sportive, pour toutes les populations. Notre ancien city-stade était complètement obsolète, on en a donc recréé un, magnifique et accessible à tous, comme l’ensemble de nos infrastructures sportives. On a aussi mis en place une station de fitness et un parcours de santé connecté.
On travaille pour relancer l’activité tennis à travers une mutualisation avec le Tennis Club de Mons en leur mettant à disposition les courts et ainsi retrouver une dynamique. En revanche, le padel ne sera pas fait puisque beaucoup de privés s’y investissent déjà. La pelouse synthétique du stade de football serait la bienvenue, mais je n’ai pas un million d’euros à investir pour. Je mets actuellement 800.000 euros sur une voirie à Mayas, c’est déjà possiblement le plus gros projet de l’histoire de Saint-Privat...
Pour revenir sur le cœur de ville, où en est le système de vidéoprotection ?
Une entreprise a été retenue, la vitesse de déploiement va dépendre de la réception des subventions. J’estime que c’est une responsabilité régalienne, je ne peux pas financer cela tout seul, l’État doit aussi y participer. J’ai eu 20.000 euros pour sécuriser autour des groupes scolaires. Viendra ensuite, si possible en 2026-2027, une quinzaine d’autres caméras.
Quelle est votre position sur la loi obligeant les communes de plus de 3500 habitants, Saint-Privat compris donc, à proposer au moins 20% de logements sociaux, sous peine d'amende ?
Cette loi a eu le mérite de favoriser la production de logements sociaux, mais elle est extrêmement rigide et ne contient aucun levier incitatif. On fait ce qu’on peut, comme les bailleurs. Surtout que les projets sont extrêmement longs, j’ai des dossiers en attente depuis cinq, voire 6 ans. Il faut arrêter de stigmatiser les élus en matière de logement social, la plupart font ce qu’ils peuvent. Il faut insérer ces résidences dans un environnement périurbain harmonieusement, dans tous les sens du terme : esthétique, acceptabilité sociale, accessibilité, etc. L’idée n’est pas de créer des ghettos.
Le projet de nouvelle mairie est-il définitivement entériné ?
Ce n’a jamais été un dossier prioritaire. On privilégie les bâtiments publics, voiries, trottoirs, etc. Le premier projet de rénovation-extension a été abandonné, comme celui de projet neuf qui était chiffré à environ 3,5 millions d’euros. Le nouveau projet de rénovation-extension est toujours à plus d’un million d’euros, il est donc en stand-by. On se débrouille, malgré les soucis d’accessibilité, pour améliorer l’existant.
Vous présiderez le salon des maires qui approche, le 22 mai prochain, comptez-vous déjà vous représenter à la présidence de l'AMF30 l'année prochaine si vous êtes bien réélu à Saint-Privat ?
C’est prématuré pour l'heure. C’est passionnant, mais très chronophage. On essaye d’améliorer la structure de l’association. Elle est utile pour mieux défendre les points de vue municipaux et négocier avec les services de l’État. Ce dernier peut facilement être un rouleau compresseur. On n’est pas dans le rapport de force, mais dans le dialogue, l’écoute, l’application intelligente de la réglementation et la construction. Critiquer est contre-productif, nos relations sont de qualité, meilleures que celles que j’ai pu connaitre il y a une vingtaine d’années.
Je crois beaucoup à l’intelligence collective, je joue à fond les partenariats. Notre rôle est pluraliste et généraliste, on représente tout le monde. À partir du moment où on adhère à l’AMF pour défendre le rôle de la commune, la fonction d’élu local, je suis prêt à discuter avec tout le monde. Il est important que le bloc local, communes et intercommunalités, parle d’une même voix. Chacun a sa place, on est complémentaires. Je suis partisan de la simplification, il ne faut pas sur administrer.