GARD « Il n’y a pas de coups, c’est à petit feu » : une Nîmoise brise le tabou des violences psychologiques

Image d'illustration
- Nils Werner / CC / FlickrEn cette Journée internationale des droits des femmes, nous publions la lettre d’une Nîmoise, qui a souhaité rester anonyme, sur son expérience des violences psychologiques au sein du couple, et un éclairage sur cette emprise par la présidente de l’association Via Femina Fama, à Nîmes, qui accompagne des femmes qui en sont victimes.
« Les violences psychologiques représentent bien 60 % des femmes qu’on reçoit », indique Danielle Gourvès, présidente de Via Femina Fama, association basée à Nîmes qui accompagne entre 300 et 400 femmes victimes de violences chaque année depuis 2012. Un type de violences « très insidieux », estime Danielle Gourvès, qui passe très souvent par l’emprise. « Cette emprise va couper la victime de ses amis, de sa famille, de son travail, et elle va se retrouver à ne plus pouvoir partir de chez elle », développe-t-elle.
Dévalorisée, la victime « ne se sent pas forcément légitime, elle se dit qu’elle ne subit pas des coups, qu’elle n’est pas blessée, peut identifier la violence psychologique comme étant ‘supportable’. Sauf que la violence psychologique va l’entraîner dans une forme de mémoire traumatique, et elle va vivre en se créant des problèmes psychologiques, encore plus si elle a des enfants, qui sont toujours des co-victimes de ces violences », poursuit Danielle Gourvès. « Il n’y a pas de coups, c'est à petit feu », en dit l’autrice de la lette publiée ci-dessous.
Ces violences sont « aujourd’hui reconnues par la loi », souligne Danielle Gourvès. Via Femina Fama accompagne ces femmes victimes, « sans imposer un choix, nous sommes là pour montrer les solutions », avance la présidente de l’association, qui peut accompagner les victimes au commissariat pour porter plainte, puis l’aiguiller vers ses partenaires, dont un cabinet d’avocats nîmois formés à ce type de violences. Puis, l’association propose des « ateliers de reconstruction », pour refaire comprendre aux victimes « qu’elles existent en tant que personne », glisse Danielle Gourvès. Des ateliers de parentalité sont aussi proposés. Cet accompagnement peut durer plusieurs années, « à leur rythme ».
Car certaines femmes ont subi des violences psychologiques de leur conjoint pendant de longues années, comme c’est le cas du témoignage ci-dessous, que son autrice a voulu diffuser largement car, même s’il est écrit à son ex-mari, « il s’adresse à toutes les femmes. » Le voici :
« Mon très cher destructeur,
Écoute mon amour, ma vulnérabilité, ma bataille, ma victoire,
C’est dans un livre et en séances chez le psy – parce que tu me l’as dit : « Tu es folle et
hystérique » – que j’ai commencé à comprendre qui tu étais après 20 ans de vie
commune et de déni.
Mais dans cette lettre, je n’ai pas envie de parler de toi. On parle trop souvent de toi,
toujours à LA 3ᵉ PERSONNE DU PLURIEL. Et oui, tu n’es pas seul à déployer ce
mécanisme, c’est le même schéma.
Je suis partie. Pas encore libre, mais partie.
Je me répare, comme on dit chez les psys.
Je ne suis même pas en colère, mais triste. Je suis vidée, et c’est une bonne nouvelle de
passer par là, car maintenant, je regarde par moi-même. Je réapprends à vivre. J’ai
coupé le lien « toxique » de notre union. Plus rien ! Ça allège terriblement mon esprit.
On me dit que je suis forte. En fait, je suis fragile, tellement fragile. Mais j’ai la vie, la
liberté de choisir comme je veux, même si je me trompe de chemin, c’est le mien, je me
sens bien. Enfin, je crois. Je doute. Ai-je encore peur ?
Tu m’as brisée en 20 ans, je le sais ! Moi qui parais si forte.
En fait, je voudrais qu’on reconnaisse ton emprise pour oublier ma culpabilité. Et là, je
sais que tu es content de savoir que je suis vulnérable.
Je lutte, et je lutterai toujours, car maintenant, je suis certaine de qui tu es. C’est comme
une maladie qu’on m’a diagnostiquée.
J’ai cru que c’était moi qui n’étais pas assez… gentille, désirable, compréhensive, forte…
et tellement de sentiments indescriptibles.
Je suis responsable de t’avoir laissé faire, d’avoir abandonné mes blessures entre tes
mains pour soulager les tiennes. À 40 ans, je voulais partir – il y a 15 ans – mais les
enfants étaient petits. Alors, je me suis anesthésiée de douleur en pleurant en cachette.
Mais les enfants ont fini par me trouver.
Tu me disais et m’écrivais que si je partais, tu te suiciderais. J’ai cru que c’était de
l’amour. Mais c’était matériel, car tu ne travaillais pas. Trop dur ! Tout le monde le savait,
mais personne ne me soutenait. Moi, je me sentais si coupable de ne pas te rendre
heureux. Tu paraissais si sociable, victime parfois, sauveur. Et derrière tout ça, mon
persécuteur silencieux… Je m’épuisais longuement et profondément en essayant
d’arranger les choses, et tu en voulais toujours plus, jusqu’à mon épuisement.
J’appelais ça « être en paix », pour que tu obtiennes tout, absolument tout ce que tu
voulais. Alors, je travaillais encore plus pour assouvir le moindre de tes désirs matériels.
Et quand tout fut épuisé, et que tu as trouvé du travail, tu m’as quittée.
Mais ce fut de courte durée, car psychologiquement, je reste TA CHOSE à détruire. Tu
piques là où ça fait mal : mes enfants, pour atteindre ce qui me reste de plus précieux.
J’ai trouvé le moyen de fuir depuis 7 ans. J’ai bien dit fuir. Mais dès que tu m’écris encore,
je m’isole, je sombre, moins longtemps maintenant, mais toujours en profondeur.
Je lâche prise pour nos enfants. Ils sont grands, intelligents, forts, et ils te quitteront un
jour. Et là, tu n’auras plus rien qui se rattache à moi. Je pourrais trouver ma paix, je sais
que c’est possible.
Alors, tu iras chercher une nouvelle proie : gentille, intelligente, forte, avec des
blessures. Comme moi.
Mais ça ne m’appartient plus. J’attends d’être libérée patiemment de toi. Et j’y arrive, en
ne te répondant plus. Petit à petit, je recolle mes morceaux brisés. Ma mémoire revient,
et je souris de nouveau pour moi, pour ma vie.
J’ai mis 7 ans à retrouver ma famille, mes amis, mon indépendance. Parfois, je
m’entends rire, je me vois sourire. Je suis belle sans mes larmes. Tellement moi-même.
Alors, cher destructeur de mon estime, j’ai souhert sous l’emprise de ce que je croyais
être de l’amour. Je t’accorde mon plus profond silence. Moi, la femme, la mère de nos
enfants et l’épouse que je fus, pour mes loyaux devoirs. Je me relève. Je connais la
résilience et couRAGE,
Une femme qui apprécie, chaque jour, le goût de sa liberté. »
Si vous êtes victime de violences, ne restez pas seule : composez le 3919, le numéro national d’aide aux femmes victimes de violences. Via Femina Fama propose quant à elle une permanence téléphonique 24/24h et 7/7j au 06 68 44 40 61.
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