FAIT DU SOIR Aimants et grappins au bout des lignes, ces chasseurs de trésors dépolluent les cours d'eau
Canettes ou capsules de bières, chariots, trotinettes, cardans de voitures, scooters ou même armes de poing, fusils démontés, etc. Ces pêcheurs à l'aimant débarrassent les cours d'eau d'objets très souvent surprenants.
Cette pratique, souvent qualifiée de loisir écolo, se développe de plus en plus dans tout le pays. Le Gard n'échappe pas à ce phénomène, même s'il est difficile de dénombrer ses adeptes locaux, lesquels ne sont encadrés par aucune fédération ou association. Pourtant chaque sortie nécessite une autorisation de l'État ou de la Mairie où le cours d'eau ciblé se situe, forcément classé en catégorie 2.
Environ 300 kg de ferraille sortis de l'eau à chaque sortie
"Il est par exemple interdit de pratiquer dans le Rhône ou le canal BRL", précise Thierry Niaulon, 47 ans, créateur du Magnet Club Collectif à Arles, rencontré lors d'une opération organisée ce dimanche au port de Gallician. Une réglementation mise en place compte tenu des risques liés à cette activité, notamment la possibilité de sortir de l’eau des produits toxiques, des armes, des munitions, voire des obus.
Bastien Hardy, 48 ans, en a fait l'expérience dès son premier lancer le 7 mars 2021, le long des berges du Viguerat, à Arles. Le Bellegardais avait sorti une grenade de l'eau. La gendarmerie et les démineurs avaient été dépêchés sur place. "Ça peut arriver, mais ça ne fait pas partie des cochonneries que nous trouvons en majorité", assure Thierry Niaulon. À chaque sortie, organisée une fois par mois, son groupe composé d'une dizaine de bénévoles collecte environ 300 kg de déchets de métaux. Leur nature est diverse et leur présence au fond des canaux ou autres, rarement, très rarement le fruit du hasard.
"On trouve vraiment de tout : des fourchettes, du matériel de bateaux, des chariots de courses, des trotinettes, des morceaux de voitures, des armes démontées", énumère Thierry. Il faut parfois s'y mettre à plusieurs pour sortir certaines pièces de l'eau. Au mois de novembre, un scooter entier a été remonté au port de plaisance de Bellegarde. "Nous avons contacté la gendarmerie car son état laissait penser qu'il était là depuis pas longtemps." En effet, cette motocyclette avait été volée quelques semaines auparavant dans le secteur d'Avignon.
Bastien a rejoint le collectif en 2021. Jusque-là, ce géomètre participait régulièrement aux diverses opérations de nettoyage de berges un peu partout dans le Gard. "Et puis, je suis tombé sur une vidéo sur YouTube du Magnet Club Collectif. J'ai trouvé que c'était une très bonne idée, une façon efficace de dépolluer les cours d'eau." Le quadragénaire mord à l'hameçon et convertit ses deux fils, Solal, 6 ans et Théo, 16 ans, à sa nouvelle passion. Alors, dès qu'il le peut le trio s'équipe de ses aimants - celui du patriarche possède une force de levage de 250 kg - et de ses grappins pour partir à la chasse aux "trésors".
Des trésors remis aux forces de l'ordre quand cela le nécessite ou déposés chez un ferrailleur. "On ne laisse jamais rien derrière nous, c'est la règle", déclarent les deux pêcheurs. Et Thierry d'ajouter : "Il ne faut pas croire que ça fait de nous des hommes riches. Aujourd'hui, le prix du fer est à environ 0,12 cts le kilo. L'objectif, c'est vraiment d'apporter notre pierre à l'édifice tout en rencontrant des gens, qu'ils pratiquent ou même les curieux qui croisent notre chemin et de partager un moment convivial."
Ce dimanche, après deux heures de pêche, le butin était bien maigre, la moitié d'une paire de ciseaux et une partie d'attelage pour tracteur. La prochaine partie de pêche à l'aimant pour le Magnet Club Collectif devrait avoir lieu au mois de février ou mars dans le secteur de Beaucaire.