GARD L'archéologie écrit l'histoire, le pillage l'efface
Le département est une zone riche en histoire, la détection sauvage inquiète chercheurs et scientifiques.
Le pillage revient à déchirer des pages de notre histoire. Dès que l'on prospecte avec un détecteur de métaux, le signal émis en présence d'un objet métallique incite à creuser le sol pour le dégager. Sorti de son contexte archéologique, on perd toute possibilité de l'étudier correctement ainsi que la compréhension du site dans son ensemble.
L'archéologie écrit l'histoire, le pillage l'efface. C'est pourquoi, sans autorisation légale, cet acte est susceptible de poursuites au titre du code du patrimoine et du code pénal.
Afin de préserver les biens et les vestiges archéologiques d'une destruction certaine, l’Institut national de recherches archéologiques préventives mène une active politique de prévention et de sensibilisation du public, sur ses chantiers et au niveau national, afin de rappeler les enjeux fondamentaux et citoyens de la protection du patrimoine et la nécessité d'une démarche archéologique, rigoureuse et scientifique.
La chasse au trésor ?
Le trafic illicite des biens culturels alimente une économie criminelle correspondant au troisième trafic mondial après celui de la drogue et des armes. Ce trafic se développe en France sur l'ensemble du territoire, aussi bien à terre qu'en mer (fonds marins devenus accessibles grâce au développement des techniques de plongée). De nombreux services archéologiques, des opérateurs et des propriétaires publics ou privés ont déjà été confrontés ou victimes d'atteintes au patrimoine archéologique. Par l'intérêt qu'elle suscite et par certains fantasmes qu'elle engendre, la recherche archéologique n'attire pas qu'un public bienveillant.
Ce trafic n'est plus l'affaire uniquement des professionnels du banditisme ou des bandes organisées et la plupart des pillages de patrimoine archéologique et des fouilles sauvages sont le fait de pilleurs amateurs ou de « chasseurs de trésor » opérant en général avec un détecteur de métaux.
Ces prospecteurs se constituent des collections personnelles illégales, voire un complément pécuniaire illicite non négligeable. En effet, les objets pillés sont ensuite, la plupart du temps, revendus de manière occasionnelle ou organisée, notamment auprès de marchands peu regardants, sur des forums et réseaux sociaux ou sur des sites de vente en ligne.
Cette activité illicite se caractérise par une grande opacité et bénéficie actuellement en France d'une certaine banalisation. Les « prospecteurs du dimanche » agissent sous le couvert d'idées reçues. « Ici, ce n'est pas un site archéologique », « Ce n'est pas vieux, ce n'est pas de l'archéologie », « On ne creuse pas profond », « J'ai l'autorisation du propriétaire », « Je suis chez moi « , « J'utilise un aimant et pas un détecteur », « Je ne vole pas, je sauve le patrimoine », « Je ne fais pas de mal, je dépollue »… Ces personnes relèvent tout de même d’infractions graves, encourant jusqu'à 100 000 euros d'amende et sept ans d'emprisonnement.
Pourquoi ne pas le faire…
De la pointe de flèche de l'âge du Bronze à la plaque d'identité d'un soldat de la Seconde Guerre mondiale... tout est sujet à pillage chez ces « collectionneurs », « passionnés » et revendeurs.
Or, une fouille archéologique est une activité scientifique complexe et codifiée qui s'apparente à une enquête où chaque indice et la place qu'il occupe sont essentiels à la compréhension de l'ensemble. Les impacts du pillage sont donc de plusieurs types, notamment. La perturbation, la destruction de niveaux ou de vestiges archéologiques à cause de trous ou de « fouilles » sauvages sans aucune réflexion et méthodologie scientifiques.
Mais on pense aussi à la perte de l'objet pour le grand public, la recherche archéologique, pour le patrimoine et pour de futures études. Enfin, on ne peut que déplorer la perte pour l'objet de son contexte archéologique, et inversement. Le problème de conservation des objets nécessitant des traitement spéciaux (radiographies, stabilisation), notamment des objets métalliques soumis à une très forte oxydation à leur sortie de terre, pose aussi son lot de problématiques.
Au-delà de la valeur financière de l'objet volé, le pillage et le trafic représentent des pertes irrémédiables de données archéologiques. Chaque strate archéologique mise au jour est en effet une page d'histoire dans le temps et l'espace offrant des repères d'un patrimoine et d'une histoire commune, à partager avec le plus grand nombre et à transmettre aux nouvelles générations.
Le patrimoine est réglementé
En France, la protection du patrimoine archéologique, bien collectif fragile et non renouvelable, est régie par trois codes principaux. Le code du patrimoine (dont le livre V concerne exclusivement l'archéologie), le code pénal qui définit les infractions (contraventions, délits et crimes) pouvant concerner le patrimoine et le code des douanes qui établit les infractions relatives à la circulation et la détention régulière des biens culturels et des trésors nationaux (à l'importation, à l'exportation et à la circulation).
Les infractions aux codes du patrimoine, pénal et douanier peuvent être cumulées dans le cadre d'une procédure judiciaire et sont regroupées dans un tableau récapitulatif des infractions.
On trouve dans ce dernier, notamment : les vols d'objets archéologiques (dont le pillage sur un site), les dégradations et destructions, les intrusions sur des sites, chantiers et musées archéologiques, le recel ou le commerce illicite sur le territoire national, vers ou en provenance de l'étranger d'objets archéologiques volés ou issus de fouilles archéologiques clandestines (achat et vente, en ligne, entre particuliers, chez un marchand, dans les brocantes ou les vides greniers...), la non tenue d'un livre de « police» par un professionnel et tout type d'actes de violence ou d'agression envers le personnel de l'Inrap (dans le cadre d'un délit flagrant de fouille clandestine, de dégradation de patrimoine archéologique...).