Publié il y a 1 an - Mise à jour le 01.06.2023 - Stéphanie Marin - 4 min  - vu 13875 fois

COLLIAS Festival Son Libre : À Cabrières, on ne l'entend pas de cette oreille

Le festival de musique électronique Son Libre a eu lieu du 18 au 21 mai sur la commune de Collias, à la frontière de Cabrières. Ce mercredi, les organisateurs et bénévoles terminaient de vider et nettoyer les lieux.

- Photo : S.Ma

Entre 6 000 et 6 500 personnes ont participé au festival de musique électronique Son Libre qui s'est tenu du 18 au 21 mai sur un terrain situé à Collias, à la frontière de Cabrières. Si l'organisation tire un bilan positif de cette nouvelle édition, de l'autre côté du Gardon, sur le territoire de l'agglomération nîmoise, le maire et un collectif de citoyens ne décolèrent pas.

La fête est finie. Les festivaliers ont quitté le plateau situé sur la commune de Collias, à un kilomètre à vol d'oiseau de Cabrières. À midi mercredi, ne restaient plus que les membres de l'association EFFKT et quelques bénévoles s'occupaient de vider et nettoyer les lieux. "Cette édition 2023 est la meilleure, en tout cas la plus aboutie en termes de scénographie, d'accueil du public, de gestion", se satisfait Rudolf, 43 ans, membre de l'équipe organisatrice du festival de musique électronique Son Libre, l'association EFFKT. Un festival autorisé par la préfecture du Gard et la mairie de Collias.

Sur la partie artistique, Gilles Gadille, maire de Cabrières, ne dira mot, quant au reste le son de cloche n'est pas le même, empruntant une tonalité grave. "Je n'ai rien contre cette manifestation, mais le lieu n'est pas adapté. Qu'ils aillent la faire ailleurs, dans une friche industrielle, ou même toujours sur Collias mais du côté de la route d'Uzès, il y en a aussi des terrains de ce côté-là."

"La musique a été entendue jusqu'à 30 km à la ronde"

Le premier édile cabriérois ne décolère pas : "Pendant quatre jours, nous avons entendu les basses, ressenti les vibrations, avec seulement deux heures de pause par jour, entre midi et 14h." Et il n'est pas le seul à s'en être plaint, un collectif composé d'une vingtaine de citoyens s'est constitué au lendemain de la fin de la manifestation, publiant dans la foulée une pétition en ligne. La préfecture a également été alertée par courrier. Olivier Gagliano, 40 ans, membre du collectif Libre 30, a vu grandir ce festival. "C'était au départ un petit événement avec les jeunes du coin, mais au fil du temps il a pris de l'ampleur rassemblant des milliers de personnes."

Olivier Gagliano, membre du collectif Libre 30 et Gilles Gadille, maire de Cabrières.  • Photo : S.Ma

En effet, et selon les dires de l'organisation, sa renommée a depassé les frontières de la France, tant au niveau du public - entre 6 000 et 6 500 visiteurs - que des artistes. Cette année, Captain Hook (Israël) entre autres DJ's internationaux, figurait en tête d'affiche du festival. Comme le maire, Olivier Gagliano pointe du doigt l'emplacement du site, situé en Zone natura 2 000, au sommet d'un massif des garrigues. Outre les nuisances sonores - "la musique a été entendue jusqu'à 30 km à la ronde", selon le collectif - le risque incendie et la protection de l'environnement sont au coeur des inquiétudes et des interrogations. 

"Par son autorisation, le maire de Collias met tout un village en danger"

Concernant le risque incendie d'abord. Pour Gilles Gadille, la présence de groupes électrogènes, de matériel électronique etc, nécessaires pour organiser ce festival, n'est pas sans danger sur ce terrain entouré de garrigue. "On n'est pas non plus à l'abri d'une cigarette mal éteinte. Un départ de feu serait catastrophique, à la fois pour les personnes sur le site et pour notre village puisque le feu descendrait forcément dans cette direction. Par son autorisation, le maire de Collias met tout un village en danger.

Rudolf, membre de l'organisation du festival Son Libre. • Photo : S.Ma

Les averses survenues en fin de semaine dernière ont soulagé les plus craintifs, mais pas question pour Rudolf de se cacher derrière le simple hasard de la météo. "Ce risque incendie a été pris en compte, des citernes de plusieurs dizaines de m3 d'eau ont été installées sur le site, des patrouilleurs en quad étaient équipés d'extincteurs, nous avons fait beaucoup de prévention et même distribué des cendriers aux festivaliers. Le risque a bien été géré en relation avec la préfecture." 

"Il ne faut pas faire l'amalgame avec le Teknival qui a eu lieu dans l'Indre"

Pour Numa Noël, adjoint au maire de Collias, en charge de la sécurité, "il ne faut pas faire l'amalgame avec le Teknival qui a eu lieu dans l'Indre." Et le même de poursuivre : "Le maire a pris l'arrêté d'ouverture d'un ERP (établissement recevant du public, NDLR) après l'autorisation des services de la préfecture. Tout un travail a été fait en amont du festival avec les acteurs compétents, ce qui a donné lieu à quatre réunions en préfecture."

Mercredi dernier, la commission de sécurité dont Numa Noël faisait partie avec les gendarmes, les pompiers, les agents de la préfecture et de l'Office national des forêts a passé plusieurs heures sur le site pour contrôler que toutes les mesures avaient été prises pour la sécurité du public. En matière de risque incendie, l'organisation avait, entre autres, une obligation de débroussaillement. "Tout était en conformité", assure l'adjoint au maire de Collias.

"Le mois de mai est au coeur de la nidification pour de nombreuses espèces d'oiseaux"

Au sujet de la protection de l'environnement, Olivier Gagliano, expert en environnement, atteste que "et c'est scientifiquement prouvé, les niveaux sonores élevés perturbent la nidification." Et le même de poursuivre : "Or le mois de mai est au coeur de la nidification pour de nombreuses espèces d'oiseaux dont plusieurs protégées puisque nous sommes en Zone Natura 2000." Le maire de Cabrières s'agace alors : "Quand on voit en matière d'urbanisme toutes les contraintes que l'on impose aux élus, et on laisse faire ça à un tel endroit ? Peut-être ont-ils eu des dérogations ? Qu'ils me disent comment ils ont fait, on s'embêtera moins !" L'aigle de Bonelli est également installé depuis de nombreuses années dans les Gorges du Gardon.

Numa Noël et Rudolf avancent, chacun de leur côté, la même ligne de défense : une étude menée l'année dernière par le syndicat mixte des Gorges du Gardon sur le Circaète Jean-le-Blanc, un oiseau protégé. "L'avis n'est pas défavorable", précise l'élu colliassois. Quant aux nuisances sonores, les deux hommes entendent les plaintes. "Je les ferai remonter à la préfecture et aux organisateurs. Dans deux mois aura lieu une réunion pour faire le bilan de cet événement et voir les points d'amélioration possibles", indique l'adjoint au maire de Collias. Pour Rudolf, changer l'orientation de la scène ainsi que le système de son, pourrait résoudre une partie du problème, amplifié selon lui par les conditions météorologiques. "Contrairement à ce qui est dit, nous n'avons pas dépassé les 102 décibels autorisés, nous avons des appareils de contrôle dans nos régies. Mais nous ne sommes pas là pour gêner la population alors nous cherchons des solutions.

Le festival de musique électronique Son Libre a eu lieu du 18 au 21 mai sur la commune de Collias, à la frontière de Cabrières. Ce mercredi, les organisateurs et bénévoles terminaient de vider et nettoyer les lieux. • Photo : S.Ma

S'installer ailleurs est une option. "Nous avons commencé nos recherches. Ce festival électro est en passe de devenir le plus grand de France, il serait préférable d'être sur un site équipé en eau, en électricité, plus facile d'accès et où les conditions seraient moins rudes, où on serait moins exposé au vent", énumère Rudolf. Et tout cela sur une surface d'au moins 25 hectares et en pleine nature. La tâche s'annonce difficile.

Stéphanie Marin

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