BAR DE VILLAGE À Colognac, Anne Chartreux tient depuis 30 ans les rênes du lieu de vie
Ouvert en 1981, le bar-tabac de la Place, à Colognac, a naturellement été repris par la fille du créateur. Depuis trente ans, Anne Chartreux voit défiler villageois et randonneurs, estivants et habitués et constate une baisse de vie du village qu'elle attribue à différentes raisons. Elle ne s'arrêtera qu'une fois acquise la certitude que le commerce sera repris.
Malgré ses tables et chaises bleu outremer en terrasse, le bar-tabac de la Place de Colognac ressemble avant tout à une maison accueillante de village, aux portes grandes ouvertes. Avant d'atteindre le comptoir et ses rangées de bouteilles, une belle collection de carafes à pastis garnit plusieur longueurs d'étagères. Quelques paquets de cigarettes sont visibiles derrière les tireuses à bière, ainsi qu'une petite offre d'épicerie, pour couvrir les urgences. "Si tu bois pour oublier, paie avant de commencer", lance un petit écriteau au-dessus du comptoir qu'habite Anne Chartreux, qui préside aux destines du bar de village.
"Ça a fait trente ans début juillet", rembobine Anne Chartreux pour évoquer sa longévité derrière le comptoir. Et si le bar ressemble tant à une maison de village, c'est que "c'était la maison de mon arrière grand-mère", raconte la tenancière, avant de devenir un bar en 1981. "Mon père a racheté la licence du dernier café qui se vendait. Il n'était pas du tout du métier, d'ailleurs c'est plutôt ma maman qui était orginaire d'ici."
Avec ses un peu plus de 200 habitants, Colognac a réussi à conserver son "premier" commerce. Un avantage que le village doit avant tout à l'engagement de ceux qui s'en occupent. "On ne vient pas ici pour faire fortune, résume Anne Chartreux dans un sourire qui accentue l'évidence. On vient pour la qualité de vie." Et alors que les résidences secondaires occupent une proportion plus importante au village que dans les années 90, la propriétaire note qu'il y a "plutôt plus de gens aujourd'hui, même si c'était différent auparavant : il y avait plus de vie de village à l'époque".
Cette mutation n'a pas changé les habitudes d'ouverture du bar, qui évoluent au gré des saisons. "Tout l'été, on est ouvert deux mois, non-stop. En automne, on ferme le lundi ; en hiver, les lundi et mardi. On ouvre alors trois matinées, plus le week-end." Le label Café de Pays, qu'avait reçu l'établissement "il y a quelques années", avait "donné quelques engagements d'animation" qui ne se sont pas perpétués. Mais Anne Chartreux a récupéré quelques services indispensables à la population.
Bar, dépôt de pain, épicerie, concerts...
"Quand la boulangerie a fermé, en 2010, on a récupéré le dépôt de pain. On a de quoi dépanner en épicerie. Et je fais aussi à manger pour le gîte d'étape que je gère." Quelques soirées se tiennent au bar, notamment en lien avec l'association culturelle du village, Lou Gagnous. "On a aussi beaucoup fait de concert, même s'il y en a moins maintenant", remarque Anne Chartreux. Et si la clientèle est là, Anne note que la fréquentation fluctue bien plus qu'avant.
"On reçoit avant tout une clientèle d'habitués, notamment au mois d'août. Ce qu'on a beaucoup perdu, c'est la clientèle étrangère des campings alentour, parce que les campings sont aujourd'hui plus fermés sur eux-mêmes". Bien souvent, ils proposent surtout une série d'animations en interne, afin d'augmenter leur chiffre d'affaires, ce qui a pour conséquence de garder les touristes en leurs murs. "Des randonneurs, il y en a beaucoup moins qu'avant, regrette aussi Anne Chartreux. On travaille plus au printemps et à l'automne avec eux. Et puis, le gîte d'Aire-de-Côte est fermé pour l'instant, c'est un gros handicap pour la fréquentation du GR 67."
"Je me suis toujours dit que je ne fermerai pas tant qu'il n'y aura pas de repreneur"
Anne Chartreux, propriétaire du bar-tabac de la Place
"Si, au final, la fréquentation s'étale sur l'année, ce n'est pas grave, relativise Anne Chartreux. Pour l'instant, on maintient l'activité." Mais, alors que son mari vient de prendre sa retraite et que son fils "ne reprendra pas", Anne espère "laisser le commerce à quelqu'un" avant d'arrêter l'activité. "Je me suis toujours dit que je ne fermerai pas tant qu'il n'y aura pas de repreneur", enfonce-t-elle. Prudente, elle se donne cinq ans pour trouver et permettre à l'un des derniers lieux de convivialité de perdurer, alors même que certaines communes proches de Colognac ont toutes les peines du monde à tenir à bout de bras un café associatif.
"Je pense que la restauration serait à développer", creuse Anne Chartreux en pensant à une diversification qui permettrait d'engranger plus de revenus. Pour l'instant, un pizzaiolo et un food-truck s'installent régulièrement sur la place. "Mais, pour une cuisine simple et bonne, il y a un créneau", est convaincue Anne Chartreux. Une cuisine qui serait un peu à l'image du village et du lieu.